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Qui a peur de l’identité nationale ? #2

  • par Natacha Gray
  • 25 févr., 2018

Deuxième partie

Identité, identités ? Des régions à l’Europe, en passant évidemment par la France comme nation, les questions dites « identitaires » sont aujourd’hui omniprésentes dans l’actualité, dans les discours, et dans les priorités, revendications ou inquiétudes exprimées par une majorité de citoyens français. Identités régionales, identité nationale, identité européenne s’emboîtent sans nécessairement s’opposer. Plus que jamais les premières s’affirment, la dernière reste encore à construire. Lignes Droites lance la réflexion sur ces questions, en commençant par le sujet sensible, parfois tabou, de l’identité nationale.


Deuxième partie


Dans une première partie (à consulter en cliquant ici) nous avons vu que la question de l’identité nationale, qui réapparaît sous ce nom dans les années 1970, se nourrit en fait d’une réflexion déjà ancienne puisque déjà Voltaire et Renan avaient tenté de cerner ce qui faisait « le génie d’un peuple », son « âme » ou le « principe spirituel » d’une nation. La défense de principes et de valeurs jugées aujourd’hui menacés, dans un contexte de crise, de mondialisation uniformisante et de multiculturalisme devenu clivant, a longtemps été abandonnée à l’extrême droite, qui en a fait son cheval de bataille principal, ce qui a conduit les autres partis à contourner la question, de peur d’être accusés de faire le jeu du Front national. C ’est avec Nicolas Sarkozy et aujourd’hui Laurent Wauquiez que la droite s’est lancée à nouveau dans la défense et l’illustration de ce qui fait l’identité de la France, ce qui a provoqué d’inévitables remous au sein de leur famille politique. Nous en avons évoqué les principaux éléments constitutifs, sur lesquels semblent peser des menaces nouvelles et inquiétantes.  

 

5. Le sentiment d’une identité menacée

Aujourd’hui le succès des discours identitaires tient en effet avant tout au fait que la majorité des Français, venant d’horizons politiques très variés, exprime le sentiment qu’ils sentent l’identité nationale gravement menacée. C’est ce que révèlent les enquêtes de terrain, les sondages, les votes, de protestation ou de défiance, mais aussi de conviction, comme en témoigne l’adhésion, plus durable que ce que l’on imaginait, d’une partie de l’électorat au programme de l’extrême droite qui a l’avantage d’avoir anticipé ce constat. Les manifestations et inquiétudes identitaires occupent également de plus en plus les conversations entre amis et les réseaux sociaux où ce thème devient un des plus fréquemment discutés, engendrant de moins en moins de polémiques comme si ce ressenti devenait paradoxalement plus rassembleur que clivant, s’exprimant désormais sans tabou, principalement sur le mode du « je ne reconnais plus ma France »). Déjà en 2013 Alain Finkielkraut exprimait-il ainsi sa nostalgie du passé en dénonçant la désagrégation rapide de l’identité nationale par son ouvrage au titre révélateur : L’identité malheureuse. Les arguments des inquiets ressemblent à un inventaire à la Prévert.

La langue, dont nous signalions précédemment qu’elle apparaît comme un élément constitutif essentiel de l’identité de la nation s’apprend mal, ou ne s’apprend plus. Dans un souci égalitariste de nivellement sur le moins-disant, certains réforment son orthographe, sa grammaire, des ouvrages sont réécrits pour les rendre accessibles au plus grand nombre … qui ne lit même plus cette littérature édulcorée. Dans certains quartiers de France, on n’entend plus parler le français. Contrairement aux premières vagues d’immigrants, nombreux sont ceux qui ne viennent pas à présent de pays francophones ou latins (ou des racines communes permettent un apprentissage plus rapide) et n’ont aucunement l’intention d’apprendre la langue du pays d’accueil, même une fois simplifiée à l’excès.

La laïcité, que l’on présente souvent comme l’ADN de notre République et une spécificité française, est mise à mal, attaquée par les ennemis de notre pays et de son système politique. Elle garantissait la cohésion nationale, elle est devenue clivante, certains la rejetant, car elles n’entrent pas dans leur schéma culturel qui place la loi de Dieu au-dessus de celle des hommes.

Notre Histoire même semble désorientée. Au grand récit national qui, comme tout récit historique, était sélectif et insistait sur les hauts faits de la France, de la construction de l’État en passant par la Renaissance, les Lumières, la Révolution, la diffusion de la culture française de par le monde, on a substitué récemment des programmes tout aussi orientés, mais qui, eux, poussent à la détestation de notre pays et, symétriquement, à la glorification des autres cultures, oubliant les hauts faits et les figures majeures de l’Histoire de France, mais également que la conquête coloniale, l’esclavagisme, le racisme furent des comportements partagés.

La culture française, sa littérature, son histoire, ses codes, son art de vivre sont noyés à la fois dans un multiculturalisme qui devrait s’y substituer et, « en même temps » dans une mondialisation gommant frontières et identités. « Il n’y a pas de culture française. Elle est diverse » ira jusqu’à dire le futur président de la République à Lyon en février 2017, lui qui en est pourtant profondément pétri, provoquant aussitôt une levée de boucliers indignés tous azimuts.

Les « racines chrétiennes » (qu’affirment fermement les populations et leurs élus dans les pays de l’Est de l’Europe) sont comme gommées dans les programmes, mais aussi des paysages au nom d’une laïcité mal comprise. Mais il est notable que nombreux sont ceux qui aujourd’hui, y compris dans les milieux athées et/ou laïcs, les revendiquent, à droite comme à gauche, témoignant par là qu’il ne s’agit pas là de simples croyances (qui relèvent de la sphère privée), mais de ce qui a forgé un peuple au fil des siècles, profondément marqué de son empreinte les paysages, les traditions, les comportements, les relations entre les êtres, les fêtes qui sont une occasion pour les Français de manifester leur cohésion et leur appartenance à un grand « tout » dépassant les opinions et spiritualités individuelles.

 

Dans les programmes de l’enseignement public, on ne donne plus à aimer notre pays, sa langue, son histoire, sa géographie. Comment veut-on alors que les jeunes, qui n’apprennent plus la citoyenneté et la fierté d’être français, et les étrangers que l’on prétend intégrer à la communauté nationale, l’aiment à leur tour ? Sans récit national, sans affirmation claire de ce qui fait la grandeur de notre pays, sans rappel ferme de ses codes et de ses lois, sans expression contagieuse de la fierté d’être ce que nous sommes, nous ne sommes plus capables d’émouvoir et de transcender. Alors l’islamisme intégriste, entre autres, s’en charge.

 

6. Où l’on rejoint la question sensible de l’immigration et de l’intégration

Il ne s’agit pas, comme le prétend une certaine police de la pensée qui cherche à étouffer le débat, de remettre en cause la tradition d’une France terre d’accueil qui fait partie de son ADN. Mais il est indéniable que l’arrivée de plus en plus massive de populations qui ne maîtrisent pas la langue, les codes, les lois de la République et de la France, pratiquant une religion, l’islam qui, dans la dérive de ceux qui font une lecture littérale du Coran, se prétend prioritaire pour le croyant sur les lois en vigueur, n’est pas sans poser de problème, car cette autre identité entre en conflit, parfois violent, avec notre identité nationale. Le risque est d’autant plus grand que la propagande islamiste, moins celle de Daesh que celle, plus subtile et sur le long terme, des Frères musulmans, finit par toucher une fraction non négligeable des populations musulmanes présentes sur le sol français, parfaitement intégrées pour la plupart, s’accommodant jusqu’alors sans problème des lois et comportements en usage dans le pays d’accueil, pratiquant un islam moderne, méditerranéen, bien loin des littéralistes du Coran. Mais voilà que certains, parmi ces populations intégrées, changent à leur tour leur comportement, leur façon de s’habiller, leurs relations entre les sexes ou avec les autres communautés, prônent la charia, exigent des exceptions (menus hallal, mise à égalité dans les fêtes religieuses…) qui ne leur avaient jamais semblé importantes auparavant. Perdant foi en la République, parce qu’elle les a déçues ou parce que des propagandistes affirment qu’elle ne peut que les décevoir, certaines populations issues de l’immigration ont adopté des réflexes communautaristes qui leur étaient parfaitement étrangers. À ceci s’ajoutent les rancœurs coloniales soudain réactivées par les nouveaux arrivants et le discours des propagandistes dont les médias mainstream, malheureusement, amplifient imprudemment l’écho.

 

Car l’affirmation des revendications identitaires de la part des Français (de naissance, par acquisition ou simplement de cœur) est aussi et avant tout une forme d’autodéfense de ce que nous sommes et représentons face à ceux qui ont fait profession de détruire la France dans ses valeurs, la République dans son système et de substituer leur modèle de société liberticide et quasi théocratique aux droits de l’homme et du citoyen qui ont inspiré notre démocratie libérale. Les Français constatent avec effroi que certains d’entre eux, ou de ceux qu’ils ont accueillis, sont capables de se retourner contre eux, jusqu'à commettre des crimes barbares sur le territoire ou à l’étranger, au côté des pires ennemis de notre pays. Le sentiment de ne plus être « chez soi » se développe chez les Français confrontés aux « camps décoloniaux », « stages en non-mixité » organisés par des personnes issues de l’immigration qui se présentent elles-mêmes comme « racisées » (tout en répétant que les races n’existent pas), propageant un racisme antiblanc ou anti-français totalement décomplexé et que l’on tente de justifier comme une revanche prise sur le colonialisme d’autrefois.

 

L’actualité conforte ce sentiment de dépossession et de danger face à des communautés qui rejettent les codes et les lois de la République. Même s’il n’est pas possible de lier délinquance et immigration, puisque la France refuse les statistiques ethniques, il est indéniable que l’actualité met en lumière dans le sentiment d’insécurité (qui ne leur est pas évidemment réductible) le rôle de populations issues de ladite immigration, accentuant le sentiment d’envahissement et surtout d’impuissance de l’État (impunité de multirécidivistes en raison de l’âge, policiers attaqués ...) face à ce que l’on nomme pudiquement des « incivilités », mot bien faible pour des actes qui relèvent de la délinquance, petite ou grande (attaque contre les forces de l’ordre, l’institution scolaire, les pompiers, trafics en tous genres, harcèlement de rue jusqu’au viol). Les faits divers (agressions, harcèlement, vandalisme…), essentiellement véhiculés par les réseaux dans un jeu malsain avec les médias mainstream (les uns cachent pour ne pas « stigmatiser », les autres amplifient et font tourner en boucle, alimentant les théories complotistes) traduisent clairement le choc de plusieurs cultures, notamment deux : la culture française face au modèle de la charia véhiculé par l’islamisme radical. Tout cela alimente des peurs face à ces minorités devenues plus visibles et la tentation de repli identitaire pour défendre le patrimoine commun ainsi attaqué.

Ces inquiétudes se trouvent amplifiées par les migrations massives, mal contrôlées, de populations de culture différente, de toute évidence mal intégrées faute de moyens suffisants, omniprésentes dans l’actualité. Les médias en font trop, cherchant à convaincre sur l’émotion, mais renforçant en retour le sentiment que l’on cherche à imposer aux Français un changement de société, donc d’identité, sur lequel ils n’ont pas été consultés.

Ces comportements sont heureusement loin d’être dominants parmi les musulmans de France, mais ce sont ceux qui s’expriment le plus fortement, le plus violemment et avec le plus de moyens. C’est donc ceux qui sont vus et entendus : racisme anti-français (jusqu’à l’invention du terme de « souchien », entendu sous-chien, aux connotations péjoratives pour désigner les Français de souche), antiblanc, christianophobie, antisémitisme, djihad, attaques contre les civilisations et les mœurs françaises, contre la liberté (qui passe par la tenue vestimentaire) des femmes, remise en cause des sapins et fêtes de Noël en entreprise, des crèches dans les régions de tradition chrétienne, des croix sur des espaces publics, drapeaux brûlés, symboles de l’autorité attaqués…

 

En outre l’exaspération est à son comble, car de nombreux Français ont le sentiment d’un deux poids deux mesures dans la façon qu’ont les pouvoirs publics et les médias de gérer la question identitaire. La fierté d’être ce que l’on est ne serait acceptable que dans la bouche de certains (Africains, Arabe, Latinos …). L’Africain peut se dire légitimement fier d’être noir et le Maghrébin d’être arabe et très attaché à une riche culture millénaire. Et c’est heureux, on ne se construit que sur des racines et dans l’estime de soi, pas dans le mépris, la honte et la culpabilité. L’un et l’autre peuvent afficher leurs appartenances ethniques ou religieuses par des pratiques que l’on accepte au nom du multiculturalisme et du légitime attachement de chaque individu à ce qui le constitue. Mais le Français qui se dit fier d’être français est suspecté de xénophobie, sa fierté d’être occidental en fait un raciste, celui qui affirme en plus sa foi chrétienne est suspecté d’extrémisme religieux, par nature prosélyte, et on le trouve d’emblée trop voyant. Les élus se rendent aux fêtes religieuses de communautés non chrétiennes diverses, mais pourchassent les symboles du christianisme dans l’espace public. Pire, ceux que Lénine aurait appelés des « idiots utiles », souvent parmi les laïcards mono-obsessionnels qui ne voient le danger que venant de l’Église catholique, devancent de supposées revendications pour exiger à la place de communautés religieuses musulmanes qui n’ont absolument rien demandé (et ne l’auraient probablement jamais fait) la disparition ici d’une crèche, là d’un sapin de Noël, ici encore d’une croix, renforçant chez certains la certitude d’un complot contre la France et son identité, toutes deux affaiblies par les attaques sournoises d’une sorte de cinquième colonne qui les menacerait de l’intérieur. Dans ce multiculturalisme qui devrait devenir la norme, une seule culture serait exclue : la culture occidentale.

 

7. Identité, altérité et les risques de « l’autruisme ».

Chez les individus les « troubles de l’identité » sont du ressort des psychiatres. L’individu va mieux lorsqu’il se « retrouve », qu’il définit ses valeurs, ses aspirations, ses talents et qu’il s’accepte enfin tel qu’il est. Mais dans les territoires, qui soignera les identités blessées ? La responsabilité des élus est grande, des médias aussi, qui participent presque tous, depuis des années, à cette grande braderie des valeurs et à ce relativisme culturel où tout se vaut et tout s’accepte.

Définir clairement l’identité nationale, c’est-à-dire les valeurs sur lesquelles s’est bâtie une nation, permet d’intégrer l’autre, de le décentrer, de lui donner envie de rejoindre cette nouvelle communauté. Ce qui ne l’empêche nullement de rester fidèle et fier de sa culture d’origine, et l’on sait la richesse des doubles cultures et leur apport à la stratigraphie des influences qui a forgé l’esprit si particulier de la nation France. L’école autrefois aidait à se décentrer par rapport à la culture transmise à la maison, donc à s’intégrer et à s’élever par la méritocratie républicaine (qui suppose effort et apprentissage), laquelle passe par la maîtrise de la langue et des codes. Or les programmes scolaires actuels et le relativisme ambiant, pire le déclinisme français qui peut aller jusqu’à la culpabilisation et la remise en cause du modèle véhiculé, accentuent le centrage de l’autre sur lui-même tout en lui faisant détester la nation d’accueil. Ce n’est pas ainsi qu’on lui donnera envie de nous rejoindre. « Comment apprendre à ceux qui viennent chez nous d'aimer la France quand nous-mêmes ne l'aimons plus." (Laurent Wauquiez en décembre dernier dans un entretien à Causeur). Car « c'est notre regard qui enferme souvent les autres dans leurs plus étroites appartenances, et c'est notre regard qui peut les libérer » (Amin Maalouf).

Intégrer suppose une dialectique entre soi et un autre, mettant en jeu l’altérité : bienveillance, écoute, prise en compte de l’autre pour ce qu’il est, et réciproquement. On s’affirme tel qu’on est en face de celui qui arrive et on lui présente le modèle qu’on lui propose d’adopter. L’autre se situe par rapport à ce que nous affirmons constituer notre identité et notre modèle et décide, ou non, de rejoindre notre communauté et d’en adopter les codes. Il sait au moins ce à quoi il devra un jour parvenir s’il décide de s’intégrer.

 

Mais aujourd’hui c’est une altérité dévoyée, ce que la philosophe Françoise Bonardel appelle l’autruisme, qui malheureusement domine dans les discours de la bien-pensance politico-médiatique. On fait passer l’autre avant soi-même, on s’efface devant lui. Soit cet autre, l’étranger, n’a plus rien à quoi se confronter puisqu’on le renvoie constamment vers lui-même, soit on lui présente des valeurs aux définitions changeantes et constamment remises en cause de l’intérieur même de la communauté nationale (laïcité, mixité, libertés, droits et devoirs …), soit, et c’est bien pire, on lui présente la communauté qui l’accueille comme inférieure à sa propre civilisation, honteuse, coupable et devant expier ses fautes ad vitam aeternam. L’identité de la France, nous l’avons dit, a toujours été d’intégrer sur des ressemblances. Que devient-elle à partir du moment où elle se cache, honteuse, laissant celui qui arrive face à lui-même, sans modèle qu’il décidera ou non d’adopter.

 

 

À suivre : 8. La solution ? Vers des identités multiples et emboîtées ?

par Bernard Carayon 9 avril 2025
Magnifique tribunedans le JDD de notre ami Bernard Carayon qui souligne parfaitement toutes les incohérences de la Commission Européenne  en matière de défense !

par Pauline Condomines (VA) 8 avril 2025
"Ce mercredi 26 mars, au Palais des Sports, une conférence sur la menace islamiste a rassemblé un large public au Palais des Sports de Paris. Bruno Retailleau, Manuel Valls et de nombreux militants, chercheurs et auteurs ont appelé à la lutte contre un fléau qui “menace la République”."

par Lignes Droites 5 avril 2025

Nouveau grand succès pour la conférence de Lignes Droites du 3 avril !

Tous nos remerciements à Monsieur Patrice Michel pour son exposé très pédagogique sur le système judiciaire français, ses liens avec les instances européennes, son histoire, et son organisation au sein des différentes justices administratives, civiles et pénales.

Tous les participants (environ 75 personnes) ont particulièrement apprécié la clarté de cet exposé et quelques idées pour améliorer son efficacité. Deux rappels essentiels ont été fait :

- notre système judiciaire est là pour faire respecter la loi et bon nombre des reproches qui lui sont fait viennent en fait du politique.

- la neutralité de la justice française a été largement entamée par certains individus, en particulier issus du syndicat de la magistrature. Ce devrait être au Conseil Supérieur de la Magistrature de garantir cette neutralité politique.  Mais sans doute par corporatisme et lâcheté, il n'intervient pas assez, même face à des situations extrêmes comme celle du "mur des cons". Là encore ce devrait être au politique d'avoir le courage de mener à bien les réformes nécessaires pour s'assurer du bon fonctionnement du Conseil de la Magistrature.

par Maxime Duclos 4 avril 2025

Aujourd’hui, la France traverse un moment décisif. Dans une décision qui ne laisse aucun doute, Marine Le Pen se voit infliger une peine d’inéligibilité, à seulement deux ans des présidentielles. Ce verdict dépasse largement le simple domaine juridique pour s’inscrire dans un affrontement politique direct.

La magistrate Bénédicte de Perthuis affirme s’inspirer d’Eva Joly pour son parcours judiciaire et son engagement en tant que magistrate. Elle l’a d’ailleurs déclaré sans ambiguïté : « Eva Joly a changé mon destin. » lors d’un podcast en 2020. Une phrase forte, qui traduit bien plus qu’une simple admiration professionnelle. On y perçoit une affection profonde pour une figure dont les opinions, notamment sur la justice, sont tranchées et assumées.

Mais Eva Joly, au-delà de son parcours de magistrate, reste aussi un personnage politique clivant, dont l’engagement écologiste et les prises de position marquées ne laissent personne indifférent. L’apprécier, c’est souvent adhérer aussi, d’une certaine manière, à une certaine vision du monde et des combats idéologiques. Dès lors, difficile d’ignorer que cette inspiration, aussi sincère soit-elle, puisse laisser planer un doute sur une possible proximité idéologique.

Dans ce contexte, le Syndicat de la magistrature, connu pour ses positions marquées à gauche et ayant publiquement appelé à voter contre l’extrême droite le 12 juin 2024 ajoute une dimension particulière à cette affaire. Cette prise de position contribue à brouiller la frontière entre engagement idéologique et impartialité judiciaire.

Dès lors, difficile de ne pas voir dans cette condamnation un verdict dont l’écho dépasse le cadre strictement juridique pour résonner sur le terrain politique, au moment même où se prépare une échéance électorale majeure.

Encore plus inquiétant, l’identité des deux assesseurs qui ont participé au verdict reste inconnue, un manque de transparence qui renforce le sentiment d’un coup d’État judiciaire. Ce flou soulève des questions cruciales sur l’impartialité et l’indépendance de notre système judiciaire, surtout à l’approche d’un scrutin historique.

Ce moment demeure un symbole fort : la justice, qui devrait être la gardienne impartiale de nos lois, se retrouve aujourd’hui au centre d’interrogations profondes. Si la magistrate ne revendique pas ouvertement d’engagement politique, son admiration pour une figure aussi marquée qu’Eva Joly, ainsi que le contexte entourant cette décision, peuvent laisser penser que son jugement pourrait être influencé par une certaine orientation idéologique. Cela envoie un message clair à l’ensemble du paysage politique français et soulève inévitablement des questions sur la frontière, de plus en plus ténue, entre justice et politique.

Face à cette situation inédite, la nécessité de transparence s’impose, et il est essentiel que les interrogations sur l’indépendance de la justice soient pleinement abordées. Ce moment marque un tournant dans la vie politique française et pose une question fondamentale : la justice peut-elle encore être perçue comme une institution neutre, ou court-elle le risque d’être influencée par des dynamiques idéologiques qui dépassent son cadre strictement juridique ?

Comme l’ont souligné plusieurs responsables politiques, dans un moment aussi décisif, même si une condamnation doit être prononcée, le fait de rendre Marine Le Pen inéligible à seulement deux ans des présidentielles soulève des doutes légitimes sur la volonté politique et idéologique de l’empêcher d’accéder au pouvoir. Selon des estimations récentes de l’IFOP, Marine Le Pen aurait eu la possibilité d’obtenir entre 34 et 38% des voix au premier tour des présidentielles de 2027, selon plusieurs sondages récents. Cette décision semble dépasser le simple cadre juridique. Ce choix, dans un contexte aussi crucial, appartient au peuple et non à une juridiction.

Il en va de la confiance des 11 millions d’électeurs qui, sans pouvoir débattre, parlementer ou exercer leur droit démocratique, se voient privés de la possibilité de voter pour la représentante politique qui, selon les projections, aurait toutes les chances de jouer un rôle clé dans la politique de 2027. Cette décision semble porter une forme de nonchalance envers ces électeurs, en les privant de la possibilité d’exprimer leur voix de manière libre et démocratique. Ce n’est pas simplement une question de légalité, mais une tentative potentielle de déstabiliser le Rassemblement National, d’affaiblir ses capacités à se renforcer et à atteindre, d’ici 2027, une représentativité de 37% des suffrages, au moment où le débat politique pourrait être radicalement transformé par leur ascension.



NDLR : Merci à Maxime Duclos pour ses billets d'humeur toujours très intéressant. On pourrait ajouter queBénédicte de Perthuis n'avait pourtant pas une réputation de sévérité particulière puisque c’est elle qui avait prononcé la relaxe du ministre Olivier Dussopt, jugé pour favoritisme (et finalement condamné en appel !). Deux poids et deux mesures ?


par Pierre Lemaignen 2 avril 2025

Par la voix d'Eric Lombard, le ministre de l’économie, Bpifrance annonçait la semaine dernière vouloir collecter 450 millions d’euros auprès des Français pour les entreprises de défense, et la création à cette fin d’un fonds baptisé « Bpifrance Défense », réservé aux particuliers et destiné à la défense et à la cybersécurité.

Voyons le côté positif des choses : les Français vont peut-être enfin découvrir ce qu'est le private equity et ses bienfaits ! Sur la période 2013/2023, les rendements du private equity français ont été de l'ordre de 13% brut. Quelqu'un qui aurait investi 500 € en France dans cette classe d'actifs aurait aujourd'hui un capital net de frais d'environ 1000 €. Sur le papier, cet investissement a donc tout pour plaire avec des entreprises qui existent déjà et qui sont souvent bien implantées, un marché a priori florissant dans les années à venir et a priori une montagne de commandes à venir. Mais comme cela est répété pour toute publicité pour un placement financier : " Les performances passées ne préjugent pas des performances futures ". Car dans ce cas de figure en particulier, il y a des hics et pas des moindres ... Le problème essentiel n'est pas l'investissement ! Il y a énormément d'épargne et de trésorerie sur le marché actuellement. Le problème essentiel c'est qu'il faut des commandes sur le long terme. Or ces commandes publiques annoncées par les pays européens seront-elles encore là dans cinq ans ?

Il faut souligner plusieurs aspects sur le risque qui porte sur ces commandes publiques en particulier pour la France :

1. Chaque pays européen va investir en fonction de deux logiques :

- diplomatique : certains continueront à acheter du matériel américain quoi qu'il arrive

- industrielle : les commandes seront soumises à des impératifs nationaux pour soutenir l’industrie locale.

On peut donc toujours mettre en avant les investissements prévus pour l'ensemble de l'Europe, l'essentiel des retombées pour l'industrie française seront essentiellement issues de la politique nationale et pas seulement européenne ...

2. Quelle confiance peut-on avoir dans les annonces d'aujourd'hui ? L'Europe a toujours été une vraie girouette sur les sujets relatifs à la défense européenne, à la fois en termes de stratégie et d'investissement.

Encore aujourd'hui, un label ESG dans ce domaine est, de fait, quasi impossible (aux côtés de l’alcool, du tabac et des jeux d’argent ...).

Même la France qui a pourtant fait partie des bons élèves en termes d'investissement dans le domaine de la défense n'a pas toujours fait preuve d'une réelle constance (en particulier sous Hollande).

Au lendemain d'un inéluctable traité de paix signé entre l'Ukraine et la Russie dans l'année à venir, ou après un hypothétique effondrement du régime russe dont ils rêvent tous, l'hystérie collective de nos dirigeants européens sera-t-elle encore d'actualité ?

3. Acheter des chars est un investissement qui trouvera toujours des détracteurs acharnés dans notre société. Bien malin est celui capable aujourd'hui de nous dire qui sera au pouvoir en France en 2030 à l'échéance de ce fond d'investissement.  

4. Comment la France compte tenu de son endettement pourra-t-elle financer ces investissements ? Compte tenu de notre niveau d'endettement, il faudra soit augmenter la fiscalité (mais nous sommes déjà champion du monde ce qui plombe nos entreprises), soit trouver des arbitrages au détriment d'autres dépenses ... Mais quels sont les arbitrages que les français accepteront : la justice ? l'éducation ? La santé ? Je ne vous parle même pas des retraites ! Certains sondages montrent qu'une majorité de Français (et j'en fais partie) est favorable aujourd'hui à cette politique de réarmement ... Mais dès que le même sondage pose des questions sur les moyens de financer cette politique, d'ores et déjà, cette majorité s'effondre. Qu'en sera t'il dans deux ou trois ans ?

La France fait déjà aujourd'hui face à un mur de la dette absolument vertigineux ( la question n'est pas son existence mais la distance à laquelle il se trouve et le temps qu'il nous reste avant qu'on se le prenne en pleine figure) et une incapacité depuis 50 ans à apporter la moindre réforme à son modèle social. Comment peut on considérer sérieusement les annonces d'augmentation du budget français de la défense de plusieurs dizaines de milliards d'euros ?

Bref, ce type de financement peut éventuellement être une poule aux œufs d'or. Il présente aussi des risques intrinsèques majeurs ! Et il faudra regarder en détail l'offre qui sera faite et analyser de manière très prudente les engagements sur les commandes à venir. Mais il est fort à craindre que dans la précipitation, nous soyons en train de mettre la charrue avant les bœufs pour participer au développement de nos entreprises !

par LR31 1 avril 2025
par Lignes Droites 13 mars 2025
Lignes Droites soutiendra toutes les candidatures d’union des droites. Bonne chance à David Gerson et à sa future équipe !

par Emmanuel Chaunu 13 mars 2025
par Maxime Duclos, adhérent Lignes Droites 10 mars 2025
Billet d'humeur d'un de nos adhérents,Maxime Duclos :  


En 1997, l’année de ma naissance, le taux de fécondité était de 1,71 enfant par femme, un chiffre déjà bien inférieur au seuil de remplacement des générations, estimé à environ 2,1 enfants par femme, sans que cela signifie pour autant que la parentalité allait de soi. Mais en 2024, les chiffres sont sans appel : 1,62 enfant par femme, et une chute des naissances qui semble inarrêtable. Comment en est on arrivé là ? Et surtout, pourquoi les jeunes d’aujourd’hui ne veulent-ils plus fonder de famille ?

La natalité française a connu une première chute importante après 1972, Mai 68 a profondément transformé la société française, et même si la chute de la natalité après 1972 n’est pas directement causée par ces événements, ils ont joué un rôle dans l’évolution des mentalités et des comportements qui ont ensuite influencé la fécondité. L’entrée massive des femmes sur le marché du travail, l’accès à la contraception et la légalisation de l’IVG en 1975 ont profondément modifié les comportements familiaux. Cependant, après cette période de déclin, la fécondité s’est stabilisée autour de 1,8-2 enfants par femme pendant plusieurs décennies. Depuis 2010, en revanche, la chute est spectaculaire : entre 2010 et 2024, le nombre de naissances est passé de 832 800 à 663 000, soit une baisse de 21,50 %. Un effondrement historique qui ne cesse de s’accélérer, sans qu’aucun véritable sursaut ne semble pointer à l’horizon.

Les raisons sont multiples, mais elles pointent toutes vers une réalité inquiétante : avoir un enfant en 2024 est devenu un choix difficile, parfois même un luxe. Pourtant, il est essentiel d’être honnête avec nous-mêmes : la précarité économique, bien que réelle, n’explique pas tout. Trop de jeunes se cachent derrière cet argument pour justifier un refus d’engagement bien plus profond. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui préfèrent "profiter" avant d’avoir des enfants, cherchant un confort personnel au détriment de la responsabilité collective. Cette mentalité est en partie héritée d’une éducation plus permissive, où les limites ont été repoussées, où la contrainte est devenue un gros mot. Les méthodes pédagogiques modernes, comme Montessori, sont souvent citées comme un progrès, mais elles traduisent aussi un changement de paradigme issu des transformations post-68 : un enfant doit s’épanouir à son rythme, être libre de ses choix, et ne pas être contraint. Résultat ? Une génération qui repousse l’effort, qui cherche avant tout son propre bien-être, et qui voit la parentalité comme une privation de liberté plutôt que comme un accomplissement.

Au-delà de cette évolution sociétale, l’idée même de nation s’efface. Faire des enfants, c’est assurer le renouvellement des générations, maintenir une dynamique économique, préserver un équilibre social. Or, nous vivons dans une société où l’individualisme prime sur l’intérêt collectif. Nous consommons, nous voyageons, nous vivons pour nous-mêmes sans nous soucier des répercussions à long terme. Cette quête incessante de liberté, ce refus des obligations, nous mènent à une impasse. Car moins de naissances, c’est aussi moins de travailleurs demain, une économie qui s’essouffle, et des systèmes de retraite qui s’effondrent. Nous ne voulons plus d’enfants, mais qui paiera alors pour notre vieillesse ?

Peut-on encore inverser la tendance ? Il ne s’agit pas de forcer les jeunes à avoir des enfants, mais de redonner du sens à la parentalité. Il faut retrouver un intérêt commun, réapprendre à voir l’avenir autrement que par le prisme de la jouissance immédiate. Faire des enfants, ce n’est pas seulement une contrainte, c’est une transmission, une continuité, un acte fondateur pour une société. Il faut redonner envie, réhabiliter la famille comme un pilier essentiel du bien-être personnel et collectif, et non plus comme une entrave. Tant que nous resterons enfermés dans cette quête illusoire de liberté absolue, tant que nous refuserons de voir au-delà de notre propre existence, la chute des naissances n’aura aucune raison de s’arrêter. Et avec elle, c’est tout un modèle de société qui s’effondrera.

Sources :

INSEE “Bilan démographique annuel”

INED “Pratiques parentales et enfance"

par Pierre Lellouche 10 mars 2025

"Sans être entendu, je n’ai cessé de répéter depuis avant même qu’elle n’éclate que la guerre d’Ukraine aurait pu être évitée. Qu’elle aurait pu, même, être stoppée dès avril 2022. Qu’au lieu de préparer la « grande offensive » ratée de juin 2023, l’Ukraine et ses alliés auraient dû négocier, avant de se trouver dans une situation bien pire à l’arrivée, comme l’avait prévu, lui aussi, le chef d’état-major des armées américaines, le général Mark Milley, fin 2022."
Une tribune très instructivesur le conflit ukrainiende Pierre Lellouche,spécialiste reconnu en géopolitique:


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