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Qui a peur de l’identité nationale ? #3

  • par Natacha Gray
  • 08 mars, 2018

Identité, identités ? Des régions à l’Europe, en passant évidemment par la France comme nation, les questions dites « identitaires » sont aujourd’hui omniprésentes dans l’actualité, dans les discours, et dans les priorités, revendications ou inquiétudes exprimées par une majorité de citoyens français. Identités régionales, identité nationale, identité européenne s’emboîtent sans nécessairement s’opposer. Plus que jamais les premières s’affirment, la dernière reste encore à construire. Lignes Droites poursuit la réflexion sur ces questions.

Le premier article (à consulter en cliquant ici) a tenté de définir l’identité de la France et de montrer la difficulté à aborder ce sujet sans être accusé de faire le jeu de l’extrême-droite qui en a fait son cheval de bataille principal, ce qui a conduit les autres partis à contourner la question. La seconde partie (à consulter en cliquant ici) s’est attachée à comprendre pourquoi une fraction croissante de la population, bien au-delà de l’électorat du Front national, a le sentiment que l’identité du pays est aujourd’hui menacée, notamment par l’immigration de populations revendiquant une autre culture et ne manifestant plus, pour certaines, l’intention de s’intégrer à la communauté nationale et d’en accepter les lois et ses valeurs. Et cela d’autant moins qu’en face « l’autruisme », qui survalorise l’autre au détriment de soi, a remplacé l’altérité dans les discours d’une certaine gauche et d’une partie de la droite et du centre.  

            Il s’agit à présent de se demander comment redéfinir, défendre, faire accepter au plus grand nombre les valeurs que nous avons définies en première partie comme inhérentes à l’identité de la France ?

 

8. Vers des identités multiples et emboîtées ?

 

  Comment refaire un peuple de ce patchwork d’identités multiples qui s’affirment aujourd’hui au travers d’un multiculturalisme qui fait ressembler notre pays davantage au salad bowl (bol de salade dans lequel les différents ingrédients se côtoient mais ne se mélangent pas) qu’au melting pot d’autrefois (le creuset où les différences se fondent), pour reprendre la typologie inventée par les sociologues et démographes américains ? Peut-il y avoir des appartenances multiples qui s’emboîteraient comme des poupées russes sans remettre en cause la solidité du tout ? Peut-on reconnaître les cultures régionales, voire les nationalismes (comme celui des Corses ou les Catalans) qui s’affirment en France comme en Europe sans affaiblir le sentiment d’appartenance à la Nation ? Et les revendications relevant de cultures exogènes, exigeant des exceptions en rupture avec les traditions voire avec les lois françaises, sont-elles compatibles avec la préservation de l’identité de la France ? La solution ne viendrait-elle pas de l’affirmation d’une culture européenne englobant celle de notre pays ? Existe-t-elle seulement et, dans l’affirmative, sur quelles valeurs communes s’est-elle construite et peut-elle être renforcée ?

 

Attachons-nous d’abord aujourd’hui à l’identité nationale : comment lui redonner du sens et réveiller la fierté et le sentiment d’être Français chez une partie de nos compatriotes ?

Il faut d’abord faire comprendre à nombre de nos concitoyens que l’on peut se sentir français sans pour autant devoir renier les autres appartenances qui fondent l’identité de chaque individu. Le corollaire est qu’en retour personne ne se réduit à une origine ethnique, une religion, un genre, une préférence sexuelle, un militantisme politique ou syndical mais que ce sont toutes ces appartenances croisées qui fondent une identité. La France d’autrefois mêlait d’ailleurs ces appartenances multiples sans que cela ne pose problème à qui que ce soit : on pouvait se définir par son village, de sa région ou pays d’origine, être issu d’une double culture préservée parallèlement, pratiquer une religion dans le cadre d’une communauté de croyants, militer dans un parti politique, adhérer à un syndicat, une association, être membre d’un club de sport et bien évidemment d’une lignée familiale. Et tout cela formait une identité globale tissée d’appartenances multiples qui se complétaient, éventuellement se contredisaient. Et ces individus, différents mais adhérant à des valeurs communes, respectant les mêmes lois, bénéficiant des mêmes droits et soumis aux mêmes devoirs, formaient le peuple français. La France était leur dénominateur commun et la valeur suprême englobante. Ainsi, jusqu’aux années 1990, à l’exception de quelques fondamentalistes, une appartenance religieuse ou ethnique n’était-elle qu’un élément constituant un individu, vécue dans le privé, en famille ou avec d’autres personnes partageant la même foi, des racines que l’on pouvait célébrer par des fêtes spécifiques au sein d’une diaspora par exemple, mais n’était pas un marqueur identitaire principal, voire unique, d’un individu.

Or de nos jours, l’actualité nous montre, au travers des revendications identitaires communautaristes, que de plus en plus d’individus s’enferment dans des appartenances parfois uniques qui ont supplanté le fait de se sentir avant tout Français. Pire, que chez certains, ce communautarisme (principalement ethnique et religieux) se constitue contre nos valeurs (par exemple la non-mixité…) et se brandit de façon ostentatoire ou revancharde comme une arme contre la France. On se dit musulman contre la France islamophobe, «  racisé  » contre la France raciste, stigmatisant la France et les Français, ou d’autres communautés présentes sur notre territoire, et exaltant un sentiment d’appartenance exclusif, agressif et méprisant que l’on prétend dénoncer chez autrui… Ces éructations identitaires provoquent, en retour, d’autres crispations identitaires elles aussi, rassemblant contre les autres et non sur des valeurs positives. On assiste ainsi à la résurgence de propos xénophobes, voire racistes, habilement entretenus par les provocations des extrêmes visant à démontrer ainsi par l’exemple (en généralisant quelques propos ouvertement outranciers) la justesse d’une cause artificiellement construite pour légitimer leur existence et leur action. C’est le cas notamment de certaines associations et d’une fraction de la gauche déboussolée par la perte du vote ouvrier, qui s’est cherché et trouvé dans les années 1980 une nouvelle raison d’être dans la dénonciation d’un racisme supposé des « souchiens »[i] ainsi qu’une oppression des minorités, dont personne ne parlait il y a encore quinze ans. Un des enjeux sera donc prioritairement de répondre à cette victimisation artificiellement construite et encouragée par certains partis et associations, entre autres par des contre-exemples dont les leaders de ces mouvements « racisés » identitaires, souvent universitaires, avocats, syndicalistes, en sont les illustrations vivantes, minorités visibles parfaitement intégrées, ayant bénéficié de l’ascenseur social à la française et de l’éducation gratuite pour tous, sans distinction aucune, invitées sur tous les plateaux des télévisions.

Il faudra dans le même temps recréer ce sentiment d’appartenance à la France, ce qui n’exclut nullement les autres appartenances dont beaucoup devraient retourner dans la sphère privée. Il faut donc réinsuffler des valeurs, du sens, une spiritualité, un héritage à défendre, un projet, tout ce qui renforcerait la fierté d’une appartenance à la France face à la marchandisation du monde, en d’autres termes redonner du sens au fait d’être Français (par naissance ou par acquisition), face également aux « valeurs » et au contre-projet offert par l’islamisme radical (culte des héros et du chef, glorification du collectif, respect, obéissance, discipline, promesse d’un au-delà…).

Cela doit s’enseigner à nouveau dès l’école pour donner envie de participer à l’intelligence ou au génie français. Quelques pistes semblent s’imposer : redonner de l’importance du récit national fortement disloqué et dénaturé par les réformes du programme d’histoire, notamment depuis celle du collège de la précédente ministre de l’Éducation nationale ; réapprendre la maîtrise de notre langue et de son héritage littéraire ; faire respecter, déjà au sein des établissements scolaires où cela s’enseignait autrefois dès le plus jeune âge, les codes et le respect des règles qui fondent la vie en société. À tous les niveaux il s’agit d’impulser un second souffle à une laïcité clarifiée de toutes ses ambiguïtés, de refaire bloc, de retrouver le sens du collectif, l’attachement à une terre, la fierté d’une histoire, à tout ce qui constitue un peuple, de remettre en valeur un patrimoine commun, un ensemble de traditions, de lois, de droits et de libertés, de devoirs aussi, tout un paquetage immatériel dont on peut être fier et pour lequel on peut accepter de s’engager, de se battre. Car comme le soulignait Michel Onfray, personne n’ira mourir pour une télévision ou une machine à laver, symboles d’une société de consommation et d’une mondialisation sans racines.

C’est aussi la mission principale donnée au service national universel que le Président Macron s’est engagé à mettre en place et auquel les Français semblent très favorables même si sa mise en application semble aujourd’hui difficile pour différentes raisons. Il est néanmoins probable que ce ne sont pas les quelques semaines prévues par l’actuel projet de SNU en l’état qui suffiront à resserrer les liens entre les Français et à convaincre les ennemis de nos valeurs de leur bien-fondé, surtout pour des générations qui sont passées par l’École d’aujourd’hui où lesdites valeurs (respect, discipline, humilité, solidarité, sens de l’effort) sont souvent foulées au pied par des jeunes non éduqués, où l’enseignement de ce qui a fait la grandeur de la France (histoire, valeurs, littérature, arts…) a laissé place à un catalogue multiculturaliste où notre pays n’a pas toujours le beau rôle, même lorsque des enseignants tentent encore de transmettre l’esprit civique comme autrefois.

 

Dans un second temps, cette réaffirmation de l’identité nationale et de la fierté d’y appartenir n’exclut nullement la reconnaissance des identités régionales et des « nationalismes » au sens historique du terme (Corses, Catalans…). Le prochain article reviendra sur ce sujet qui ne sera donc pas évoqué trop longuement ici. Remarquons simplement déjà qu’un peu partout en Europe on assiste à la montée de revendications identitaires à l’échelle régionale : Catalogne, Corse, Écosse, Italie du Nord, Flandre... Cette progression des revendications régionales[ii] tient à plusieurs facteurs qu’il n’est pas l’objet de présenter ici. Mais il faut bien prendre conscience que cette affirmation identitaire à l’échelle infranationale, voire transfrontalière parfois, est déjà une réalité, qu’elle sera durable et ne fera qu’augmenter. Refuser le dialogue ne fera pas disparaître ce phénomène, bien au contraire. Or la puissance d’une nation repose, entre autres éléments essentiels, sur le désir de populations disparates de se réunir sur des valeurs, un héritage et un projet commun.  

Les craintes d’un affaiblissement de l’État central en donnant davantage de poids au local existent, et elles sont fondées, mais c’est précisément en refusant d’entendre et de comprendre l’expression de ces identités locales que l’on risque d’aboutir à l’épreuve de force et au risque d’éclatement, comme en Catalogne espagnole. C’est pourquoi le dialogue est plus que jamais nécessaire afin de renforcer le camp autonomiste et éviter une escalade des revendications indépendantistes. Les Corses dont la majorité territoriale nationaliste (autonomistes et indépendantistes) a récemment présenté les revendications identitaires au Président Macron, parfaitement compatibles avec le maintien de l’île dans un cadre républicain, demandent un approfondissement de leur statut spécifique, qui ne l’est plus tant que cela depuis que la révision constitutionnelle de 2003 a institué un statut ex generis pour la Nouvelle-Calédonie, des compétences à la carte pour l’Outremer…

Il faudra sans doute reconnaître ces cultures communautaires, ces usages régionaux, ces spécificités marquées comme on a fini par le faire pour les territoires ultramarins. À ce titre une réflexion est à mener à l’heure où la mondialisation et l’homogénéisation des modes de vie et des paysages poussent, par réflexe, à redécouvrir ses racines en commençant par le local. La solidité du tout dépend de celle de l’adhésion de ses différents éléments : c’est ce que l’on nomme le consensus, qui est, pour les politologues, un des principaux fondements de la puissance d’une nation. Nous l’avons dit, on ne fédère pas durablement contre, mais pour. Et jamais par la contrainte, le mépris, l’indifférence et la table rase de ce qui constitue autrui dans son identité.

 

Troisièmement, il en est de même pour les communautés ethniques évoluant sur le sol français, déjà longuement évoquées dans le précédent article : rien de les empêche de pratiquer leur religion, de parler leur langue d’origine, de maintenir leurs usages vestimentaires et culinaires, leurs coutumes, dans la sphère privée, comme dans la sphère publique, tant que cela ne heurte pas les usages, lois et codes de la société d’accueil. C’était le cas avant les revendications communautaristes récentes, avant qu’un certain nombre de musulmans (29 %) ne soient convaincus par les propagandistes fondamentalistes que les lois divines (la charia) passent avant les lois de la République comme le montrait une enquête de l’Institut Montaigne en septembre 2016 qui insistait sur cette inquiétante tendance. Avant que la propagande salafiste, originaire des pays du Golfe et autrefois totalement étrangère à l’Islam méditerranéen, ne se répande dans certains quartiers, puis plus largement par voie médiatique et via les réseaux sociaux, il n’y avait pas d’incompatibilité ressentie entre la pratique de l’Islam et l’acceptation des principes républicains, comme le montre la proportion importante (46 %) de musulmans considérés par la même enquête comme parfaitement intégrés et sécularisés, dans le respect des valeurs républicaines et du principe de laïcité.

Aujourd’hui le problème vient de ce que les extrêmes de part et d’autre jouent sur les sentiments identitaires en les radicalisant, faisant croire aux musulmans qu’ils sont rejetés et menacés. Aux manipulations islamistes ont fait écho les discours d’une partie de la gauche, repris avec délectation par les médias, légitimant les revendications communautaristes au nom d’un relativisme culturel, d’une culpabilisation postcoloniale, allant jusqu’à soutenir les « camps décoloniaux », les stages en non-mixité et autres stigmatisations de la France « souchienne ». Nous le voyons avec l’affaire Tarik Ramadan (qui reste une question de droit commun et non un harcèlement anti-musulman comme le vivent une partie des croyants manipulés par la propagande des Frères musulmans), avec celle de Mennel (à qui l’on reproche non le voile comme cela se lit sur les réseaux, mais des propos complotistes et sa proximité avec des associations et personnages clairement en lutte contre les principes républicains), l’affaire Jeanne d’Arc (radicalisant les positions racistes et xénophobes et les procès d’intention qui font le jeu des extrêmes des deux côtés), le sujet est devenu si sensible et le piège si bien conçu que sortir de cette situation ne sera pas simple. Il faudra un effort d’explication qui doit avant tout venir des instances de l’Islam, une fois réformées et réorganisées comme le veut le Président Macron (car elles sont aujourd’hui majoritairement entre les mains des islamistes dits — à tort — « modérés », le courant des Frères Musulmans, dans lequel d’ailleurs une majorité de croyants en France ne se reconnaissent pas) ; davantage de lucidité, de retenue et donc éducation des internautes trop prompts à réagir et à radicaliser leurs positions, ce qui est exactement ce qui est voulu par les ennemis de la République ; nettement plus de sens civique de la part des médias qui donnent si facilement la parole à tous ceux qui cherchent à répéter, à défaut de le prouver, que la France est raciste, que la laïcité ou la démocratie ont fait leur temps, que l’avenir est au multiculturalisme, encourageant la culpabilité d’un côté, les revendications, la victimisation, voire la haine de l’autre…

La propagande islamiste a ainsi réussi en une quinzaine d’années à dresser contre la France une partie de ses enfants, parce que la bien-pensance de gauche et la crainte de voir criminaliser ses propos par la terreur idéologique qu’elle avait réussi à instaurer, via les médias, via le monde éducatif, ont muselé toute critique et laissé prospérer le discours de l’anti-France en toute impunité, faisant passer les dérapages, incivilités, voire même le terrorisme, pour des problèmes strictement économiques alors qu’on se rend compte aujourd’hui qu’il s’agissait aussi, et même avant tout, d’une question religieuse, identitaire et d’une véritable intentionnalité destructrice des valeurs, des principes républicains. Apparemment la réaction contre le communautarisme clivant, tardive, est en route, car beaucoup ont compris, à droite comme à gauche, qu’il n’était plus temps de se cacher derrière les dénis de réalité.

 

Mais au-delà, et c’est la quatrième et dernière échelle de réflexion, ne faudrait-il pas travailler tous ensemble au sein de l’UE à la définition d’une identité européenne qui engloberait l’identité nationale française ? Et cela pour trois raisons.

La première est le risque de se couper d’autres pays de l’UE, notamment ceux de l’est de l’Europe où les questions identitaires sont posées aujourd’hui sans tabou et où le rapprochement entre États se fait sur cette préoccupation-là. On se souvient de la volonté de la Pologne d’inscrire «  les racines chrétiennes de l’Europe  » dans la Constitution européenne rejetée en 2005 et des clivages qui s’étaient alors dessinés entre pays partenaires ! Partout en Europe on assiste à la progression rapide et parfois même à la victoire électorale de partis, que les médias français qualifient aussitôt d’extrême droite, qui ont fait de la préservation de l’identité nationale leur principal thème de campagne. C’est le cas cette semaine de l’Italie, comme ce le fut en Autriche, en Allemagne et dans les pays de l’est de l’Europe. Les opinions publiques, et la plupart des partis, de droite comme de gauche, soutiennent très massivement des gouvernements élus sur cet axe majeur de leur programme qu’est la préservation de leur identité nationale jugée menacée par l’afflux depuis deux ans de migrants originaires d’Afrique ou du Moyen-Orient, de confession musulmane, dans des proportions qu’il est difficile d’intégrer dans des pays en crise où le taux de chômage et le sentiment de déclassement sont importants, traumatisés de surcroît par une actualité récurrente autour de l’insécurité, d’agressions diverses [notamment dans des incidents impliquant les femmes].

Face à cela, hélas, la seule réponse de l’Union européenne est le déni de réalité et le mépris [qui passe par une catégorisation manichéenne : les peuples ayant « mal » voté sont qualifiés par certains de nazis, fachos, d’extrême-droite, certains appelant même l’Histoire récente à la rescousse pour expliquer la résurgence de tendances profondes] mais aussi la menace, puisque la Commission européenne n’a rien trouvé de mieux que d’engager une action devant la Cour de Justice de l’UE contre la République tchèque, la Pologne et la Hongrie pour leur refus d’accueillir leur quota de migrants fixé contre leur volonté.

  Cet aveuglement des instances de Bruxelles risque de coûter cher à la construction européenne. La semaine dernière, le premier ministre de la République tchèque, Andrej Babis, déclarait solennellement devant les députés dans une séance retransmise en direct par la télévision nationale. : «  nous sommes, par principe, contre le fait que qui que ce soit nous dicte qui a le droit de vivre et de travailler dans notre pays  », assurant que le pays n’accueillera aucun migrant dans le cadre des quotas obligatoires de l’UE. Il faisait écho à l’intransigeance de la Hongrie : «  Aucune personne ne sera installée en Hongrie contre le gré du peuple hongrois  » déclarait en septembre dernier le chef de la diplomatie hongroise, Péter Szijjarto.

 Les pays de l’Est, malgré des rivalités du passé, se rapprochent donc aujourd’hui dans une vision commune de l’identité européenne et dans le cadre du groupe de Visegrad [République tchèque, Slovaquie, Pologne et Hongrie], tentant de défendre à Bruxelles une autre politique que celle de l’UE : ils prennent acte que leurs peuples refusent les migrations et demandent à remplacer l’accueil par l’assistance matérielle et financière vers les pays générant des flux migratoires tout en renforçant leurs frontières. Ces pays ont d’ailleurs déjà transféré des aides importantes à des pays africains. On voit que l’on est bien loin de la vision manichéenne véhiculée par nos médias et par certains élus, réduisant la réaction nationaliste à une progression d’une « extrême-droite » forcément raciste et égoïste. L’éditorialiste de l’Express, Christian Makarian, le reconnaissait cette semaine dans son commentaire des leçons à tirer des élections italiennes [iii] : «  L’Europe actuelle souligne la plus grande faillite de la sociologie : la rémanence du fait culturel est désormais le facteur fondamental de l’identité européenne. Les opinions publiques ne supportent plus de se voir imposer, dans le désordre et la confusion, une nouvelle société multiculturelle au sujet de laquelle on ne les a pas consultées. Elles remettent en question les partis et les responsables qui en ont décidé ainsi et — plus grave — risquent bientôt de contester les institutions mêmes et les principes qui ont permis de prendre ces décisions  ».

La seconde raison qui inciterait à travailler sur ce qui fonde une identité européenne commune est qu’au niveau interétatique, il faut une « âme » pour redonner du souffle à cette Europe qui convainc les élus, mais nettement moins les populations gagnées par la désillusion, l’euroscepticisme, voire l’europhobie. Le sentiment d’appartenance à une échelle qui dépasse la nation ne se fera pas sur de simples intérêts économiques partagés. La célèbre formule, probablement apocryphe, que l’on attribue à l’un des pères de l’Europe, Jean Monnet : «  si c’était à refaire je commencerais par la culture  », témoigne par son succès de la pertinence de cette intime conviction. Travailler sur l’identité européenne, sur ce qui nous rassemble, c’est forger une identité à cette Union qui apparaît à beaucoup, pour l’instant, comme un simple rassemblement froid de partenaires économiques qui ne sont pas d’accord sur grand-chose.

La troisième raison c’est que l’union fait la force. Parler d’identité européenne, c’est sans doute déjà vaincre les réticences de ceux qui craignent l’enfermement des frontières, les réflexes identitaires exclusifs et xénophobes et qui restent hésitants à se saisir de ce combat. À la réflexion, peu de choses différencient notre identité nationale de celle de nos partenaires européens : notre langue, notre Histoire [bien qu’un certain nombre d’épisodes y ont été partagés avec d’autres] et notre laïcité [qui, dans les faits, se vit généralement de la même manière hors de nos frontières puisqu’il s’agit de garantir la coexistence pacifique des diverses religions]. Pour le reste, démocratie libérale, racines chrétiennes, droits de l’homme et du citoyen, égalité entre hommes et femmes, héritage de l’Humanisme et des Lumières, le substrat est le même et pourrait constituer un socle identitaire solide. «  Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas » prophétisait André Malraux. Il faut donc donner un sens, un enracinement dans l’Histoire, une spiritualité à cette Europe et cela d’autant plus, qu’en face, c’est une autre spiritualité, un autre projet qui vient nous combattre sur notre propre territoire.

 

            En conclusion, il ne faut pas qu’une droite honteuse hésite encore à se réapproprier la défense de l’identité nationale, terrifiée par les anathèmes lancés par une certaine gauche. Le combat pour définir, préserver et faire rayonner l’identité de la France n’appartient à personne. Le Front national s’est saisi de ce thème avant tout le monde, mais il n’en est pas le propriétaire exclusif. Il ne l’a même pas « confisqué » : comme pour le drapeau, Jeanne d’Arc ou la Marseillaise, il n’a fait que ramasser ce dont les autres partis s’étaient peu à peu détournés. Sans doute parce que l’on croyait, à tort, que ces valeurs-là [libertés, égalité des droits, fraternité, responsabilité, respect des règles qui fondent le contrat social, laïcité] étaient si solidement ancrées dans nos pratiques qu’il n’y avait plus besoin d’en parler. Après les attentats, des Français de tous bords se sont réapproprié les symboles de la France [drapeau et hymne national], affirmant également leur appartenance à une culture judéo-chrétienne qui a façonné notre histoire, nos mœurs et nos paysages. Il faut qu’il en soit ainsi de l’identité, qui n’est pas un gros mot et qui ne doit plus servir à stigmatiser, pour le faire taire, celui qui le prononce. Toute réflexion sur l’identité française ne vient pas nécessairement d’une supposée «  fachosphère  ». Ce procès d’intention et ces anathèmes fonctionnent d’ailleurs de moins en moins sur les réseaux et les plateaux de télévision. Mais chez de nombreux hommes et femmes politiques, c’est un peu comme si ce mouvement de fond n’était pas encore perçu. Il serait pourtant dommage de manquer une fois encore ce rendez-vous avec les citoyens, les électeurs, la France et l’Europe.



[i] « Souchien » : terme méprisant (sous-chien) inventé pour désigner les Blancs et utilisé pour la première fois il y a une dizaine d’années par la leader du Parti des Indigènes de la République, Houria Bouteldja. On ne le dénonce habituellement que lorsqu’il est repris par un de ceux qui sont ici visés par ce terme volontairement dégradant.

 

[ii] Pour éviter la confusion avec l’échelle de la France, on qualifiera ici de « régionales » les revendications nationalistes dans des régions historiquement dotées d’un fort sentiment d’appartenance (Corse, Catalogne) bien qu’il s’agisse ici de peuples (au sens historique et culturel aussi, même si la Constitution leur dénie ce qualificatif) constituant, au sens des démographes et sociologues, de véritables « nations ».

 

par Bernard Carayon 9 avril 2025
Magnifique tribunedans le JDD de notre ami Bernard Carayon qui souligne parfaitement toutes les incohérences de la Commission Européenne  en matière de défense !

par Pauline Condomines (VA) 8 avril 2025
"Ce mercredi 26 mars, au Palais des Sports, une conférence sur la menace islamiste a rassemblé un large public au Palais des Sports de Paris. Bruno Retailleau, Manuel Valls et de nombreux militants, chercheurs et auteurs ont appelé à la lutte contre un fléau qui “menace la République”."

par Lignes Droites 5 avril 2025

Nouveau grand succès pour la conférence de Lignes Droites du 3 avril !

Tous nos remerciements à Monsieur Patrice Michel pour son exposé très pédagogique sur le système judiciaire français, ses liens avec les instances européennes, son histoire, et son organisation au sein des différentes justices administratives, civiles et pénales.

Tous les participants (environ 75 personnes) ont particulièrement apprécié la clarté de cet exposé et quelques idées pour améliorer son efficacité. Deux rappels essentiels ont été fait :

- notre système judiciaire est là pour faire respecter la loi et bon nombre des reproches qui lui sont fait viennent en fait du politique.

- la neutralité de la justice française a été largement entamée par certains individus, en particulier issus du syndicat de la magistrature. Ce devrait être au Conseil Supérieur de la Magistrature de garantir cette neutralité politique.  Mais sans doute par corporatisme et lâcheté, il n'intervient pas assez, même face à des situations extrêmes comme celle du "mur des cons". Là encore ce devrait être au politique d'avoir le courage de mener à bien les réformes nécessaires pour s'assurer du bon fonctionnement du Conseil de la Magistrature.

par Maxime Duclos 4 avril 2025

Aujourd’hui, la France traverse un moment décisif. Dans une décision qui ne laisse aucun doute, Marine Le Pen se voit infliger une peine d’inéligibilité, à seulement deux ans des présidentielles. Ce verdict dépasse largement le simple domaine juridique pour s’inscrire dans un affrontement politique direct.

La magistrate Bénédicte de Perthuis affirme s’inspirer d’Eva Joly pour son parcours judiciaire et son engagement en tant que magistrate. Elle l’a d’ailleurs déclaré sans ambiguïté : « Eva Joly a changé mon destin. » lors d’un podcast en 2020. Une phrase forte, qui traduit bien plus qu’une simple admiration professionnelle. On y perçoit une affection profonde pour une figure dont les opinions, notamment sur la justice, sont tranchées et assumées.

Mais Eva Joly, au-delà de son parcours de magistrate, reste aussi un personnage politique clivant, dont l’engagement écologiste et les prises de position marquées ne laissent personne indifférent. L’apprécier, c’est souvent adhérer aussi, d’une certaine manière, à une certaine vision du monde et des combats idéologiques. Dès lors, difficile d’ignorer que cette inspiration, aussi sincère soit-elle, puisse laisser planer un doute sur une possible proximité idéologique.

Dans ce contexte, le Syndicat de la magistrature, connu pour ses positions marquées à gauche et ayant publiquement appelé à voter contre l’extrême droite le 12 juin 2024 ajoute une dimension particulière à cette affaire. Cette prise de position contribue à brouiller la frontière entre engagement idéologique et impartialité judiciaire.

Dès lors, difficile de ne pas voir dans cette condamnation un verdict dont l’écho dépasse le cadre strictement juridique pour résonner sur le terrain politique, au moment même où se prépare une échéance électorale majeure.

Encore plus inquiétant, l’identité des deux assesseurs qui ont participé au verdict reste inconnue, un manque de transparence qui renforce le sentiment d’un coup d’État judiciaire. Ce flou soulève des questions cruciales sur l’impartialité et l’indépendance de notre système judiciaire, surtout à l’approche d’un scrutin historique.

Ce moment demeure un symbole fort : la justice, qui devrait être la gardienne impartiale de nos lois, se retrouve aujourd’hui au centre d’interrogations profondes. Si la magistrate ne revendique pas ouvertement d’engagement politique, son admiration pour une figure aussi marquée qu’Eva Joly, ainsi que le contexte entourant cette décision, peuvent laisser penser que son jugement pourrait être influencé par une certaine orientation idéologique. Cela envoie un message clair à l’ensemble du paysage politique français et soulève inévitablement des questions sur la frontière, de plus en plus ténue, entre justice et politique.

Face à cette situation inédite, la nécessité de transparence s’impose, et il est essentiel que les interrogations sur l’indépendance de la justice soient pleinement abordées. Ce moment marque un tournant dans la vie politique française et pose une question fondamentale : la justice peut-elle encore être perçue comme une institution neutre, ou court-elle le risque d’être influencée par des dynamiques idéologiques qui dépassent son cadre strictement juridique ?

Comme l’ont souligné plusieurs responsables politiques, dans un moment aussi décisif, même si une condamnation doit être prononcée, le fait de rendre Marine Le Pen inéligible à seulement deux ans des présidentielles soulève des doutes légitimes sur la volonté politique et idéologique de l’empêcher d’accéder au pouvoir. Selon des estimations récentes de l’IFOP, Marine Le Pen aurait eu la possibilité d’obtenir entre 34 et 38% des voix au premier tour des présidentielles de 2027, selon plusieurs sondages récents. Cette décision semble dépasser le simple cadre juridique. Ce choix, dans un contexte aussi crucial, appartient au peuple et non à une juridiction.

Il en va de la confiance des 11 millions d’électeurs qui, sans pouvoir débattre, parlementer ou exercer leur droit démocratique, se voient privés de la possibilité de voter pour la représentante politique qui, selon les projections, aurait toutes les chances de jouer un rôle clé dans la politique de 2027. Cette décision semble porter une forme de nonchalance envers ces électeurs, en les privant de la possibilité d’exprimer leur voix de manière libre et démocratique. Ce n’est pas simplement une question de légalité, mais une tentative potentielle de déstabiliser le Rassemblement National, d’affaiblir ses capacités à se renforcer et à atteindre, d’ici 2027, une représentativité de 37% des suffrages, au moment où le débat politique pourrait être radicalement transformé par leur ascension.



NDLR : Merci à Maxime Duclos pour ses billets d'humeur toujours très intéressant. On pourrait ajouter queBénédicte de Perthuis n'avait pourtant pas une réputation de sévérité particulière puisque c’est elle qui avait prononcé la relaxe du ministre Olivier Dussopt, jugé pour favoritisme (et finalement condamné en appel !). Deux poids et deux mesures ?


par Pierre Lemaignen 2 avril 2025

Par la voix d'Eric Lombard, le ministre de l’économie, Bpifrance annonçait la semaine dernière vouloir collecter 450 millions d’euros auprès des Français pour les entreprises de défense, et la création à cette fin d’un fonds baptisé « Bpifrance Défense », réservé aux particuliers et destiné à la défense et à la cybersécurité.

Voyons le côté positif des choses : les Français vont peut-être enfin découvrir ce qu'est le private equity et ses bienfaits ! Sur la période 2013/2023, les rendements du private equity français ont été de l'ordre de 13% brut. Quelqu'un qui aurait investi 500 € en France dans cette classe d'actifs aurait aujourd'hui un capital net de frais d'environ 1000 €. Sur le papier, cet investissement a donc tout pour plaire avec des entreprises qui existent déjà et qui sont souvent bien implantées, un marché a priori florissant dans les années à venir et a priori une montagne de commandes à venir. Mais comme cela est répété pour toute publicité pour un placement financier : " Les performances passées ne préjugent pas des performances futures ". Car dans ce cas de figure en particulier, il y a des hics et pas des moindres ... Le problème essentiel n'est pas l'investissement ! Il y a énormément d'épargne et de trésorerie sur le marché actuellement. Le problème essentiel c'est qu'il faut des commandes sur le long terme. Or ces commandes publiques annoncées par les pays européens seront-elles encore là dans cinq ans ?

Il faut souligner plusieurs aspects sur le risque qui porte sur ces commandes publiques en particulier pour la France :

1. Chaque pays européen va investir en fonction de deux logiques :

- diplomatique : certains continueront à acheter du matériel américain quoi qu'il arrive

- industrielle : les commandes seront soumises à des impératifs nationaux pour soutenir l’industrie locale.

On peut donc toujours mettre en avant les investissements prévus pour l'ensemble de l'Europe, l'essentiel des retombées pour l'industrie française seront essentiellement issues de la politique nationale et pas seulement européenne ...

2. Quelle confiance peut-on avoir dans les annonces d'aujourd'hui ? L'Europe a toujours été une vraie girouette sur les sujets relatifs à la défense européenne, à la fois en termes de stratégie et d'investissement.

Encore aujourd'hui, un label ESG dans ce domaine est, de fait, quasi impossible (aux côtés de l’alcool, du tabac et des jeux d’argent ...).

Même la France qui a pourtant fait partie des bons élèves en termes d'investissement dans le domaine de la défense n'a pas toujours fait preuve d'une réelle constance (en particulier sous Hollande).

Au lendemain d'un inéluctable traité de paix signé entre l'Ukraine et la Russie dans l'année à venir, ou après un hypothétique effondrement du régime russe dont ils rêvent tous, l'hystérie collective de nos dirigeants européens sera-t-elle encore d'actualité ?

3. Acheter des chars est un investissement qui trouvera toujours des détracteurs acharnés dans notre société. Bien malin est celui capable aujourd'hui de nous dire qui sera au pouvoir en France en 2030 à l'échéance de ce fond d'investissement.  

4. Comment la France compte tenu de son endettement pourra-t-elle financer ces investissements ? Compte tenu de notre niveau d'endettement, il faudra soit augmenter la fiscalité (mais nous sommes déjà champion du monde ce qui plombe nos entreprises), soit trouver des arbitrages au détriment d'autres dépenses ... Mais quels sont les arbitrages que les français accepteront : la justice ? l'éducation ? La santé ? Je ne vous parle même pas des retraites ! Certains sondages montrent qu'une majorité de Français (et j'en fais partie) est favorable aujourd'hui à cette politique de réarmement ... Mais dès que le même sondage pose des questions sur les moyens de financer cette politique, d'ores et déjà, cette majorité s'effondre. Qu'en sera t'il dans deux ou trois ans ?

La France fait déjà aujourd'hui face à un mur de la dette absolument vertigineux ( la question n'est pas son existence mais la distance à laquelle il se trouve et le temps qu'il nous reste avant qu'on se le prenne en pleine figure) et une incapacité depuis 50 ans à apporter la moindre réforme à son modèle social. Comment peut on considérer sérieusement les annonces d'augmentation du budget français de la défense de plusieurs dizaines de milliards d'euros ?

Bref, ce type de financement peut éventuellement être une poule aux œufs d'or. Il présente aussi des risques intrinsèques majeurs ! Et il faudra regarder en détail l'offre qui sera faite et analyser de manière très prudente les engagements sur les commandes à venir. Mais il est fort à craindre que dans la précipitation, nous soyons en train de mettre la charrue avant les bœufs pour participer au développement de nos entreprises !

par LR31 1 avril 2025
par Lignes Droites 13 mars 2025
Lignes Droites soutiendra toutes les candidatures d’union des droites. Bonne chance à David Gerson et à sa future équipe !

par Emmanuel Chaunu 13 mars 2025
par Maxime Duclos, adhérent Lignes Droites 10 mars 2025
Billet d'humeur d'un de nos adhérents,Maxime Duclos :  


En 1997, l’année de ma naissance, le taux de fécondité était de 1,71 enfant par femme, un chiffre déjà bien inférieur au seuil de remplacement des générations, estimé à environ 2,1 enfants par femme, sans que cela signifie pour autant que la parentalité allait de soi. Mais en 2024, les chiffres sont sans appel : 1,62 enfant par femme, et une chute des naissances qui semble inarrêtable. Comment en est on arrivé là ? Et surtout, pourquoi les jeunes d’aujourd’hui ne veulent-ils plus fonder de famille ?

La natalité française a connu une première chute importante après 1972, Mai 68 a profondément transformé la société française, et même si la chute de la natalité après 1972 n’est pas directement causée par ces événements, ils ont joué un rôle dans l’évolution des mentalités et des comportements qui ont ensuite influencé la fécondité. L’entrée massive des femmes sur le marché du travail, l’accès à la contraception et la légalisation de l’IVG en 1975 ont profondément modifié les comportements familiaux. Cependant, après cette période de déclin, la fécondité s’est stabilisée autour de 1,8-2 enfants par femme pendant plusieurs décennies. Depuis 2010, en revanche, la chute est spectaculaire : entre 2010 et 2024, le nombre de naissances est passé de 832 800 à 663 000, soit une baisse de 21,50 %. Un effondrement historique qui ne cesse de s’accélérer, sans qu’aucun véritable sursaut ne semble pointer à l’horizon.

Les raisons sont multiples, mais elles pointent toutes vers une réalité inquiétante : avoir un enfant en 2024 est devenu un choix difficile, parfois même un luxe. Pourtant, il est essentiel d’être honnête avec nous-mêmes : la précarité économique, bien que réelle, n’explique pas tout. Trop de jeunes se cachent derrière cet argument pour justifier un refus d’engagement bien plus profond. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui préfèrent "profiter" avant d’avoir des enfants, cherchant un confort personnel au détriment de la responsabilité collective. Cette mentalité est en partie héritée d’une éducation plus permissive, où les limites ont été repoussées, où la contrainte est devenue un gros mot. Les méthodes pédagogiques modernes, comme Montessori, sont souvent citées comme un progrès, mais elles traduisent aussi un changement de paradigme issu des transformations post-68 : un enfant doit s’épanouir à son rythme, être libre de ses choix, et ne pas être contraint. Résultat ? Une génération qui repousse l’effort, qui cherche avant tout son propre bien-être, et qui voit la parentalité comme une privation de liberté plutôt que comme un accomplissement.

Au-delà de cette évolution sociétale, l’idée même de nation s’efface. Faire des enfants, c’est assurer le renouvellement des générations, maintenir une dynamique économique, préserver un équilibre social. Or, nous vivons dans une société où l’individualisme prime sur l’intérêt collectif. Nous consommons, nous voyageons, nous vivons pour nous-mêmes sans nous soucier des répercussions à long terme. Cette quête incessante de liberté, ce refus des obligations, nous mènent à une impasse. Car moins de naissances, c’est aussi moins de travailleurs demain, une économie qui s’essouffle, et des systèmes de retraite qui s’effondrent. Nous ne voulons plus d’enfants, mais qui paiera alors pour notre vieillesse ?

Peut-on encore inverser la tendance ? Il ne s’agit pas de forcer les jeunes à avoir des enfants, mais de redonner du sens à la parentalité. Il faut retrouver un intérêt commun, réapprendre à voir l’avenir autrement que par le prisme de la jouissance immédiate. Faire des enfants, ce n’est pas seulement une contrainte, c’est une transmission, une continuité, un acte fondateur pour une société. Il faut redonner envie, réhabiliter la famille comme un pilier essentiel du bien-être personnel et collectif, et non plus comme une entrave. Tant que nous resterons enfermés dans cette quête illusoire de liberté absolue, tant que nous refuserons de voir au-delà de notre propre existence, la chute des naissances n’aura aucune raison de s’arrêter. Et avec elle, c’est tout un modèle de société qui s’effondrera.

Sources :

INSEE “Bilan démographique annuel”

INED “Pratiques parentales et enfance"

par Pierre Lellouche 10 mars 2025

"Sans être entendu, je n’ai cessé de répéter depuis avant même qu’elle n’éclate que la guerre d’Ukraine aurait pu être évitée. Qu’elle aurait pu, même, être stoppée dès avril 2022. Qu’au lieu de préparer la « grande offensive » ratée de juin 2023, l’Ukraine et ses alliés auraient dû négocier, avant de se trouver dans une situation bien pire à l’arrivée, comme l’avait prévu, lui aussi, le chef d’état-major des armées américaines, le général Mark Milley, fin 2022."
Une tribune très instructivesur le conflit ukrainiende Pierre Lellouche,spécialiste reconnu en géopolitique:


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