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Le mur et les enfants ou le bal des faux-culs

  • par Natacha Gray
  • 23 juin, 2018

Du poids des idéologies, des appartenances partisanes, de l’information et de l’indignation sélectives

Crédit : l'Express

Les médias français, et bien au-delà, comme ceux de la bien-pensance étatsunienne, poussent aujourd’hui des cris d’orfraie devant des faits (enfants d’immigrants illégaux séparés de leurs parents) et des discours (affirmations provocatrices de Trump se disant décidé à appliquer la loi américaine tant qu’elle n’aura pas été légalement modifiée). Il en est de même du fameux mur séparant États-Unis et Mexique que l’on dit à tort « mur de Trump ». Si l’émotion est légitime, les mémoires sont bien courtes et il y a, dans la criminalisation des faits, comme toujours, deux poids deux mesures. Ce qui est acceptable (ou passé sous silence) à gauche (ou chez les démocrates aux Etats-Unis) devient criminalisable et « facho » à droite (ou chez les républicains).

Rappelons d’abord les faits.

1. Le mur tout d’abord.

L’opinion s’est d’abord focalisée sur la promesse de campagne du président américain de finir ce fameux mur, puis sur le décret du 25 janvier 2017 visant à démarrer les travaux. L’Europe sans frontières, échaudée par le mur de Berlin de sinistre mémoire, réagit naturellement par l’émotion et par analogie sans tenir compte des différences de contexte, à tout projet de construction d’une nouvelle matérialisation de frontière entre deux pays. Mais les mémoires sont bien sélectives. On entend ainsi parler (incompétence ou désinformation volontaire ?) de « construction » là où il ne s’agit donc que de prolongement et d’élargissement

Les objectifs sont clairs : la frontière américano-mexicaine, de l’Océan Atlantique au Pacifique, marquée sur une partie de son parcours par le fleuve Rio Grande (Rio Bravo del Norte) est longue d’environ 3200 km. Elle est la frontière la plus franchie au monde compte tenu de l’écart de développement économique entre Amérique du Nord d’un côté, et Mexique, Amériques centrale et du Sud de l’autre. Pour les États-Unis, un objectif déjà ancien a donc été de lutter conjointement contre les migrations économiques clandestines mais également d’empêcher commerce et passage des narcotrafiquants sur le territoire américain. En outre, ce qui se passe de l’autre côté de la frontière, où patrouille l’armée mexicaine, n’incite guère les Américains à ouvrir grand leur territoire aux migrants illégaux venant du Sud : la violence de la région est endémique et Ciudad Juarez en est l’exemple le plus révélateur. Ville la plus dangereuse au monde, elle présente l’effrayant bilan de 130 meurtres pour 100 000 habitants annuellement, liés entre autres à des règlements de comptes entre les commandos des Cartels mais aussi à un féminicide gratuit, par simple sexisme (plus de 2000 femmes assassinées entre 2000 et 2009), que dénoncent depuis longtemps les organisations humanitaires et les féministes d’Amérique du Nord.

L’historique du mur rappelle que tout cela ne n’est donc pas né avec le président Trump. La sécurisation de cette frontière a été une préoccupation constante de toutes les administrations successives depuis la fin des années 1970, qu’elles soient démocrates ou républicaines. Sous les présidences Carter, Reagan et G.H. Bush, cela s’est traduit par l’augmentation spectaculaire des financements pour le recrutement d’une force paramilitaire (la Patrouille frontalière), le déploiement de capteurs enterrés, d’hélicoptères, de spots lumineux et la construction d’une première barrière basse (notamment en zone urbaine) d’abord en chaîne puis en tôles. Sous les deux mandats de Bill Clinton ce furent des « opérations blocus » par le déploiement de gardes puis la mise en place de barrières un peu plus élaborées et solides que les premières.

Avec G.W.Bush et Obama, la « virtualisation » s’est ajoutée à la construction de barrières physiques : il s’agissait d’utiliser différentes technologies de surveillance (caméras high tech notamment, drones…) pour faciliter les interventions des gardes frontaliers. Parallèlement s’est poursuivie, modernisée et accélérée la construction d’« infrastructures tactiques » (nouvelles barrières et routes de patrouille), dont le fameux « mur » qui n’est donc pas « de Trump ». Par conséquent ce mur n’est qu’un élément, qui matérialise physiquement la frontière, parmi tout un dispositif de sécurisation et de militarisation de celle-ci.

Ce mur (18m de haut, miradors…) longeant le Rio Grande a ainsi été décidé et commencé par Bush en 2006 (Secure Fence Act), il s’agissait de prolonger le contrôle de la frontière, déjà effectif en zone urbaine, vers les espaces ruraux. En 2006, le Congrès Américain avait adopté le projet par 283 voix pour contre 138 contre (219 républicains et 64 démocrates avaient voté oui.) ainsi que le Sénat quelques jours plus tard (80 voix contre 19 parmi lesquelles 23 démocrates, dont Obama, contre 19 l’avait eux aussi approuvé).

Car le sénateur de l’Illinois, Barack Obama, avait bien voté pour le Secure Fence Act de 2006 et défendu la construction d’un mur matérialisant la frontière entre États-Unis et Mexique. Pour ce qui est de l’opinion publique, la décision fut rapidement plébiscitée (les migrations clandestines ayant rapidement diminué de 25%) : à l’époque du Secure Fence Act, 53% des Américains se disaient contre ce projet. En 2010, sous la présidence Obama, 68% s’y déclaraient favorables et 21% contre (ce qui a sans doute contribué à faire « oublier » sa promesse de campagne au président élu en 2009). Il en est de même de certains Etats qui aujourd’hui crient au scandale : en Californie la Garde nationale dès 2000 a déployé un important contingent pour soutenir l’action des garde-frontières fédéraux.

En effet, bien qu’ayant soutenu et voté pour la construction du mur en 2006, le candidat Obama lors de sa première campagne avait promis, pour satisfaire une partie de son électorat, de revenir sur le Secure Fence Act. Une fois au pouvoir il n’en a plus jamais reparlé et a laissé la construction se prolonger, restant sourd à toutes les voix qui s’élevaient pour lui rappeler sa promesse. Comme souvent, lors de l’accession aux responsabilités, ceux qui surfent sur les bons sentiments et sur l’émotion sont brutalement rappelés à la réalité des faits ! Ainsi les travaux de construction du mur, commencés sous l’administration Bush (455 km) et se sont prolongés sous l’administration Obama. À l’origine le mur devait être terminé en 18 mois, soit en 2008, mais le financement prévu a été multiplié par presque quatre, aboutissant au ralentissement puis à l’arrêt des travaux.

Le mur (en fait des portions de mur) dans sa localisation actuelle

À l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, 1/3 de la frontière, soit 1300 km, étaient déjà matérialisés par cette nouvelle barrière. Pour lui, il ne s’agit donc pas de construire un nouveau mur, comme cela est ânonné régulièrement sur les médias français, mais de prolonger et d’élargir celui qui existe déjà. Mais Donald Trump se heurte, comme ses prédécesseurs, aux lourdes réalités financières. Le Mexique refusant de co-financer la construction, il est prévu de taxer de 20% les produits mexicains pour payer le prolongement de l’ouvrage. Mais Trump compte bien obtenir d’autres financements, d’où la poursuite de l’immigration clandestine au pénal et sa conséquence, la séparation entre adultes et enfants qui émeut aujourd’hui dans le monde entier.

Précisons enfin que le mur n’empêche pas les migrations légales et même illégales. Aujourd’hui on recense 3 millions de mouvements par an concernant les seules migrations (sans compter les 80 millions de touristes) et plus d’un million de passages autorisés quotidiens entre les deux pays pour des raisons, diverses (en grande partie touristiques et de travail) dont 200 000 personnes par jour à Tijuana, un record mondial ! Alors que seuls 5000 visas sont accordés aux travailleurs passant par cette frontière, ils sont 500 000 (dont 75% de Mexicains) estimés sur le marché du travail américain. L’immigration illégale reste donc élevée à la frontière avec le Mexique : de mars à mai 2018, plus de 50.000 personnes ont été appréhendées chaque mois. Environ 15% de ces clandestins arrivent en famille et 8% sont des mineurs non-accompagnés. On en arrive donc à l’affaire qui excite les médias et les consciences, jusqu’aux prises de position de l’ONU et de Mélania Trump.

 

2. La séparation entre parents et enfants pour les migrations clandestines

Les faits :

Le gouvernement Trump a annoncé récemment une politique de « tolérance zéro » en matière d’immigration et révélé que 1995 enfants avaient été séparés de leurs parents en 6 semaines, entre mi-avril et fin mai, soit presque autant que depuis son élection en octobre 2016. L’objectif, en médiatisant cette mesure et l’image des enfants parfois en pleurs et parqués derrière des grilles, est évidemment de faire réagir : d’un côté c’est évidemment un avertissement destiné à décourager les immigrants potentiels, de l’autre une façon de faire pression sur le Mexique qui refuse toujours de financer le mur tout en condamnant officiellement les filières d’immigration illégale, et enfin une volonté de mettre les démocrates et les républicains récalcitrants face à leur conscience pour obtenir du Congrès les milliards qui manquent au prolongement du mur.

Que dit la loi américaine ?

"Nous ne voulons pas séparer les familles, mais nous ne voulons pas que des familles viennent illégalement à la frontière […]. Si vous faites passer un enfant, nous vous poursuivrons. Et cet enfant sera séparé de vous, comme requis par la loi" a déclaré le Président américain. Car cette loi (Immigration and Nationality Act), datée de 1952, révisée en 1965 et durcie après le 11 septembre 2001, précise que, lorsque des adultes sont détenus dans le système pénitentiaire pour des délits pénaux, leurs enfants ne peuvent pas les suivre en prison : ils sont donc confiés à l'Office de relocalisation des réfugiés (ORR), qui dépend du ministère de la Santé et des services sociaux.

Qu’ont fait les démocrates ?

Ils ont évidemment appliqué cette loi chaque fois qu’un immigrant clandestin était poursuivi au pénal, arrêté et conduit en prison. D’ailleurs on peut entendre ici clairement Hillary Clinton, secrétaire d’Etat et le Président Obama rappeler cette loi et menacer les immigrants clandestins de ce qui les attend potentiellement. Mais le changement est que l’administration Trump inculpe plus facilement et plus souvent que ses prédécesseurs qui privilégiaient les poursuites au civil à l’encontre des clandestins passibles d’expulsion. Les familles étaient alors plus fréquemment détenues dans des centres de rétention administrative, ou leur cas traité par des voies alternatives, en attendant l’examen de leur demande d’asile.

Que fait l’administration Trump de plus ?

La « tolérance zéro » signifie que toutes les personnes interpellées en situation irrégulière sur le territoire américain ne sont plus poursuivies pour une infraction civile mais pénalement, donc appréhendées à leur entrée sur le territoire américain, incarcérées dans des prisons fédérales et leurs enfants (sauf les nourrissons) envoyés dans des centres de rétention séparés comme le veut la loi américaine. La criminalisation de l’immigration clandestine va de pair avec l’affirmation par le président américain que la hausse de la criminalité en Europe et les heurts interculturels assez violents sont la conséquence des migrations massives que celle-ci connaît principalement depuis 2015.

Quelques remarques en guise de conclusion

Il y a vraiment deux poids deux mesures dans la façon de présenter les informations. Si la construction de ce mur est une abomination ou si elle est légitime, elle l’était aussi du temps de ceux qui ont décidé de sa mise en place et ont autorisé l’édification des premiers 1300 km. Mais il semble qu’il y ait des discours ou décisions qui, sous la gauche en Europe ou les démocrates aux Etats-Unis soient parfaitement acceptables mais qui deviennent criminels, voire «fachos» dès lors que ce sont la droite ou les républicains qui sont concernés.

Si l’on considère que les Américains peuvent avoir des inquiétudes légitimes pour différentes raisons face aux migrations massives, cela vaut évidemment autant pour les périodes Clinton, Bush, Obama ou Trump. Rappelons que ces inquiétudes ont pu concerner l’emploi en période de chômage, aujourd’hui largement jugulé, et la volonté manifestée par les électeurs américains que toutes les ressources nationales soient désormais destinées prioritairement aux nationaux. Puis il y eut le renforcement de l’enjeu sécuritaire après le 11 septembre 2001, que cela concerne le terrorisme, la criminalité ordinaire ou les ravages de la drogue importée par les cartels et narco-trafiquants sud-américains.

Enfin, comme en Europe, se posent des questions identitaires : déjà en 2004 le professeur de Harvard Samuel Huntington s’interrogeait sur l’hispanic challenge. Représentant jusqu’à 60% des électeurs dans des portions de territoires, en particulier au Sud, les Hispaniques sont devenus la première minorité aux Etats-Unis, devant la minorité noire. De manière plus générale, les WASP (white anglo saxon protestants), les Blancs, seront minoritaires en 2042, si les tendances se poursuivent, à la fois en raison de la poursuite de l’immigration mexicaine et d’une croissance naturelle plus soutenue. Huntington, s’appuyant sur le développement de la langue espagnole remplaçant de plus en plus l’anglais dans certains Etats, sur des revendications identitaires menant à l’éclatement communautariste et sur certaines enclaves, en particulier dans les Etats du Sud, regroupant des populations hispaniques vivant entre soi et refusant d’intégrer les codes de la civilisation américaine, craignait la partition prochaine du territoire américain en deux langues, deux civilisations alors que d’autres théoriciens, s’appuyant sur des revendications explicites d’activistes anti-américains et racistes, parlaient carrément d’invasion, de remplacement, de « revanche ». L’image du salad bowl (le bol de salade où les ingrédients sont juxtaposés) a remplacé dans les études sociologiques le légendaire melting pot, le creuset où toutes les influences se fondaient autrefois pour forger l’homme ou la femme américains.

Ceci dit, depuis la publication de cette étude qui a profondément marqué (et traumatisé) l’opinion américaine, on s’est aperçu (et Huntington lui-même l’a reconnu, revenant peu avant son décès en 2008 sur une partie de ses craintes) que tout n’était pas aussi simple, la fécondité d’immigrants hispaniques s’alignant progressivement sur celle des Américains plus longuement installés, la langue anglaise s’imposant chez les élites mexicaines intégrées. Le vote des « latinos» et des autres minorités qui, contrairement à ce que l’on aurait pu penser, ne fut pas défavorable à Trump malgré son discours anti-immigrationniste, est la preuve que, d’une certaine manière et dans une certaine mesure, l’intégration façon « melting pot » poursuit son cours et que de nombreux immigrés, une fois installés, craignent comme d’autres Américains, les vagues migratoires à venir et de voir leurs conditions de vie se dégrader. Par contre, les craintes exprimées au début du XXIe siècle d’une société éclatée par le communautarisme des minorités issues de l’immigration semble aujourd’hui largement vérifiées par l’essor de mouvements identitaires et des discours revanchards, racialistes, essentialistes et souvent racistes (anti-blancs) nord-américains, plus récemment importés en Europe (Racisé.e.s, Indigènes de la République …). La situation est donc complexe et irréductible à des slogans politiques, qu’ils soient immigrationnistes, nationalistes ou carrément xénophobes.

Le parallèle avec les inquiétudes qui montent en Europe jusqu’à bouleverser le jeu électoral et l’équilibre des forces dans de nombreux pays, est évident. Que les partisans de frontières ouvertes et d’une immigration massive, qu’elle soit économique ou humanitaire, condamnent fermement la politique étatsunienne est parfaitement cohérent et normal. Il est juste étrange qu’ils fassent semblant de penser que tout a commencé avec Trump, même s’il est vrai que le remuant président américain clame bien haut ce que ses prédécesseurs faisaient plus honteusement sans s’en vanter. Mais enfin, le mur de Bush fut longtemps un classique des sujets du bac en terminale et à l’Université, personne ou presque ne peut prétendre qu’il ignorait qui en avait décidé la construction et qui l’avait poursuivie ! Mais en revanche il est curieux de voir certains faiseurs d’opinion, journalistes ou politiques, et de nombreux internautes, alors qu’ils reconnaissent souhaiter instamment le retour de la fermeté sur les frontières de l’Europe et que l’on puisse à nouveau distinguer les véritables demandes d’asile de la migration économique, voire de motivations nettement plus floues, s’interroger sur la légitimité des inquiétudes américaines et s’indigner de la volonté affichée de son administration de mieux contrôler les frontières de l’Etat fédéral.

Certes l’application de la loi est cruelle. La question est de savoir et de décider, une bonne fois pour toutes, si l’on peut ainsi jouer sur l’émotion (même si les enfants ne sont pas maltraités, la séparation d’avec les parents est cruelle et peut laisser des traces ultérieurement) pour faire pression et se faire entendre. Car, en retour, on joue également sur l’émotion, que ce soit pour trouver le prétexte à des ingérences extérieures dans des pays souverains ou pour faire entrer des populations illégalement sur le territoire européen. Les ONG dans leur collaboration objective avec les passeurs généralement islamistes en usent en permanence. Si cette « démocratie de l’émotion » est effectivement abjecte, il faut reconnaître qu’elle l’est dans tous les sens quand il s’agit de manipuler les opinions au détriment du droit, des faits et de la volonté ou de l’intérêt des peuples concernés.

Les Etats qui dénoncent aujourd’hui cette forme de chantage au sentiment de l’administration Trump ne sont pourtant pas les derniers à s’en servir. L’Aquarius, en quelque sorte pris en otage et bloqué une semaine durant sur la Méditerranée, dans le refus explicite des uns et le silence assourdissant des autres, est l’équivalent de l’isolement des enfants sur la frontière entre Mexique et Etats-Unis : c’est un moyen de se faire enfin entendre pour les Etats qui souhaitent une prise de conscience et un changement de la politique migratoire européenne. Certains envisagent même désormais la solution la plus logique, qui serait de ramener les navires de clandestins vers les ports les plus proches, en Tunisie ou en Libye, ce qui serait une bien cruelle fin de traversée pour ces candidats à l’immigration dont on apprend que chacun a payé 3000 euros aux passeurs (manne financière continue qui va alimenter le djihad et le trafic d’armes) ! Mais ce serait assurément une solution radicale pour mettre un terme au petit jeu entre filières crapuleuses de passeurs et ONG patrouillant en permanence aux larges de leurs eaux territoriales, créant cet appel d’air continu et rendant de facto caduc l’accord avec les autorités libyennes visant à examiner sur place les demandes d’immigration. Mettre un terme au trafic éviterait à ces populations en détresse politique ou économique un déplacement coûteux, risqué, parfois vain quand il se solde par un retour après rejet de la demande d’asile, ou des conditions de vie indignes et très loin de leurs attentes lorsqu’ils arrivent et restent sur des territoires qui n’ont plus les moyens de les accueillir, donc de les intégrer. Avec les conséquences que l’on connaît … Faudra-t-il en arriver comme Trump au chantage à la cruauté pour que l’on pose enfin collectivement, sans anathème ni procès d’intention, les problèmes liés à l’immigration sur la table, dans l’intérêt de tous, et des pays d’accueil, et des immigrants en transit, et des pays de départ pour lesquels la bien-pensance ne se pose jamais la question des effets de la privation, pour ces Etats, de milliers d’hommes, plus rarement de femmes, jeunes et dynamiques. Ils sont pourtant l’avenir du continent africain, et constitueraient déjà une force vive pour les armées africaines que doivent suppléer des militaires français qui, parfois, tombent sur le sol étranger. Les sociologues, économistes et démographes ont pourtant, depuis longtemps alerté sur les effets à moyen et long terme de cette “géographie de l’absence”!

Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ? Il est en tous cas étrange de lire ou d’entendre ainsi condamner par certains ce qui se fait aux Etats-Unis tout en manifestant les mêmes inquiétudes et la même volonté de renforcement de contrôle ici, pour de simples raisons d’appartenance idéologique ou par répulsion pavlovienne pour celui que les médias ont choisi de diaboliser. Cela ne dit pas qu’il ait raison ou tort, la réalité hélas n’est pas manichéenne mais d’une complexité rare, puisque se mêlent dans ces questions-là les lois des Etats et les droits de l’homme, les émotions brutes et les faits constatés, les intentions et les arrière-pensées, les risques et les avantages, les responsabilités des uns et des autres, d’hier, d’aujourd’hui et de demain …. S’il y avait une solution évidente en matière de migrations, elle aurait été appliquée depuis longtemps.

Mais si l’on continue de se positionner non pas en fonction des faits et des discours, avec lesquels on est d’accord ou pas, mais en fonction de qui les tient et de ce que les médias nous autorisent à penser, et cela vaut pour la question migratoire comme pour toutes les autres priorités, nous serons condamnés à subir éternellement ce que d’autres auront décidé à notre place. Il y a des moments dans l’histoire des nations où, lorsque l’on a sérié les priorités et l’urgence, l’union est nécessaire au-delà des divergences, car elle seule fait la force. Se positionner en fonction de chapelles, de sympathies ou d’antipathies, de concurrences entre mouvements ou entre leaders d’opinion, est le meilleur moyen d’offrir la victoire à nos adversaires, voire à nos ennemis.

par Bernard Carayon 9 avril 2025
Magnifique tribunedans le JDD de notre ami Bernard Carayon qui souligne parfaitement toutes les incohérences de la Commission Européenne  en matière de défense !

par Pauline Condomines (VA) 8 avril 2025
"Ce mercredi 26 mars, au Palais des Sports, une conférence sur la menace islamiste a rassemblé un large public au Palais des Sports de Paris. Bruno Retailleau, Manuel Valls et de nombreux militants, chercheurs et auteurs ont appelé à la lutte contre un fléau qui “menace la République”."

par Lignes Droites 5 avril 2025

Nouveau grand succès pour la conférence de Lignes Droites du 3 avril !

Tous nos remerciements à Monsieur Patrice Michel pour son exposé très pédagogique sur le système judiciaire français, ses liens avec les instances européennes, son histoire, et son organisation au sein des différentes justices administratives, civiles et pénales.

Tous les participants (environ 75 personnes) ont particulièrement apprécié la clarté de cet exposé et quelques idées pour améliorer son efficacité. Deux rappels essentiels ont été fait :

- notre système judiciaire est là pour faire respecter la loi et bon nombre des reproches qui lui sont fait viennent en fait du politique.

- la neutralité de la justice française a été largement entamée par certains individus, en particulier issus du syndicat de la magistrature. Ce devrait être au Conseil Supérieur de la Magistrature de garantir cette neutralité politique.  Mais sans doute par corporatisme et lâcheté, il n'intervient pas assez, même face à des situations extrêmes comme celle du "mur des cons". Là encore ce devrait être au politique d'avoir le courage de mener à bien les réformes nécessaires pour s'assurer du bon fonctionnement du Conseil de la Magistrature.

par Maxime Duclos 4 avril 2025

Aujourd’hui, la France traverse un moment décisif. Dans une décision qui ne laisse aucun doute, Marine Le Pen se voit infliger une peine d’inéligibilité, à seulement deux ans des présidentielles. Ce verdict dépasse largement le simple domaine juridique pour s’inscrire dans un affrontement politique direct.

La magistrate Bénédicte de Perthuis affirme s’inspirer d’Eva Joly pour son parcours judiciaire et son engagement en tant que magistrate. Elle l’a d’ailleurs déclaré sans ambiguïté : « Eva Joly a changé mon destin. » lors d’un podcast en 2020. Une phrase forte, qui traduit bien plus qu’une simple admiration professionnelle. On y perçoit une affection profonde pour une figure dont les opinions, notamment sur la justice, sont tranchées et assumées.

Mais Eva Joly, au-delà de son parcours de magistrate, reste aussi un personnage politique clivant, dont l’engagement écologiste et les prises de position marquées ne laissent personne indifférent. L’apprécier, c’est souvent adhérer aussi, d’une certaine manière, à une certaine vision du monde et des combats idéologiques. Dès lors, difficile d’ignorer que cette inspiration, aussi sincère soit-elle, puisse laisser planer un doute sur une possible proximité idéologique.

Dans ce contexte, le Syndicat de la magistrature, connu pour ses positions marquées à gauche et ayant publiquement appelé à voter contre l’extrême droite le 12 juin 2024 ajoute une dimension particulière à cette affaire. Cette prise de position contribue à brouiller la frontière entre engagement idéologique et impartialité judiciaire.

Dès lors, difficile de ne pas voir dans cette condamnation un verdict dont l’écho dépasse le cadre strictement juridique pour résonner sur le terrain politique, au moment même où se prépare une échéance électorale majeure.

Encore plus inquiétant, l’identité des deux assesseurs qui ont participé au verdict reste inconnue, un manque de transparence qui renforce le sentiment d’un coup d’État judiciaire. Ce flou soulève des questions cruciales sur l’impartialité et l’indépendance de notre système judiciaire, surtout à l’approche d’un scrutin historique.

Ce moment demeure un symbole fort : la justice, qui devrait être la gardienne impartiale de nos lois, se retrouve aujourd’hui au centre d’interrogations profondes. Si la magistrate ne revendique pas ouvertement d’engagement politique, son admiration pour une figure aussi marquée qu’Eva Joly, ainsi que le contexte entourant cette décision, peuvent laisser penser que son jugement pourrait être influencé par une certaine orientation idéologique. Cela envoie un message clair à l’ensemble du paysage politique français et soulève inévitablement des questions sur la frontière, de plus en plus ténue, entre justice et politique.

Face à cette situation inédite, la nécessité de transparence s’impose, et il est essentiel que les interrogations sur l’indépendance de la justice soient pleinement abordées. Ce moment marque un tournant dans la vie politique française et pose une question fondamentale : la justice peut-elle encore être perçue comme une institution neutre, ou court-elle le risque d’être influencée par des dynamiques idéologiques qui dépassent son cadre strictement juridique ?

Comme l’ont souligné plusieurs responsables politiques, dans un moment aussi décisif, même si une condamnation doit être prononcée, le fait de rendre Marine Le Pen inéligible à seulement deux ans des présidentielles soulève des doutes légitimes sur la volonté politique et idéologique de l’empêcher d’accéder au pouvoir. Selon des estimations récentes de l’IFOP, Marine Le Pen aurait eu la possibilité d’obtenir entre 34 et 38% des voix au premier tour des présidentielles de 2027, selon plusieurs sondages récents. Cette décision semble dépasser le simple cadre juridique. Ce choix, dans un contexte aussi crucial, appartient au peuple et non à une juridiction.

Il en va de la confiance des 11 millions d’électeurs qui, sans pouvoir débattre, parlementer ou exercer leur droit démocratique, se voient privés de la possibilité de voter pour la représentante politique qui, selon les projections, aurait toutes les chances de jouer un rôle clé dans la politique de 2027. Cette décision semble porter une forme de nonchalance envers ces électeurs, en les privant de la possibilité d’exprimer leur voix de manière libre et démocratique. Ce n’est pas simplement une question de légalité, mais une tentative potentielle de déstabiliser le Rassemblement National, d’affaiblir ses capacités à se renforcer et à atteindre, d’ici 2027, une représentativité de 37% des suffrages, au moment où le débat politique pourrait être radicalement transformé par leur ascension.



NDLR : Merci à Maxime Duclos pour ses billets d'humeur toujours très intéressant. On pourrait ajouter queBénédicte de Perthuis n'avait pourtant pas une réputation de sévérité particulière puisque c’est elle qui avait prononcé la relaxe du ministre Olivier Dussopt, jugé pour favoritisme (et finalement condamné en appel !). Deux poids et deux mesures ?


par Pierre Lemaignen 2 avril 2025

Par la voix d'Eric Lombard, le ministre de l’économie, Bpifrance annonçait la semaine dernière vouloir collecter 450 millions d’euros auprès des Français pour les entreprises de défense, et la création à cette fin d’un fonds baptisé « Bpifrance Défense », réservé aux particuliers et destiné à la défense et à la cybersécurité.

Voyons le côté positif des choses : les Français vont peut-être enfin découvrir ce qu'est le private equity et ses bienfaits ! Sur la période 2013/2023, les rendements du private equity français ont été de l'ordre de 13% brut. Quelqu'un qui aurait investi 500 € en France dans cette classe d'actifs aurait aujourd'hui un capital net de frais d'environ 1000 €. Sur le papier, cet investissement a donc tout pour plaire avec des entreprises qui existent déjà et qui sont souvent bien implantées, un marché a priori florissant dans les années à venir et a priori une montagne de commandes à venir. Mais comme cela est répété pour toute publicité pour un placement financier : " Les performances passées ne préjugent pas des performances futures ". Car dans ce cas de figure en particulier, il y a des hics et pas des moindres ... Le problème essentiel n'est pas l'investissement ! Il y a énormément d'épargne et de trésorerie sur le marché actuellement. Le problème essentiel c'est qu'il faut des commandes sur le long terme. Or ces commandes publiques annoncées par les pays européens seront-elles encore là dans cinq ans ?

Il faut souligner plusieurs aspects sur le risque qui porte sur ces commandes publiques en particulier pour la France :

1. Chaque pays européen va investir en fonction de deux logiques :

- diplomatique : certains continueront à acheter du matériel américain quoi qu'il arrive

- industrielle : les commandes seront soumises à des impératifs nationaux pour soutenir l’industrie locale.

On peut donc toujours mettre en avant les investissements prévus pour l'ensemble de l'Europe, l'essentiel des retombées pour l'industrie française seront essentiellement issues de la politique nationale et pas seulement européenne ...

2. Quelle confiance peut-on avoir dans les annonces d'aujourd'hui ? L'Europe a toujours été une vraie girouette sur les sujets relatifs à la défense européenne, à la fois en termes de stratégie et d'investissement.

Encore aujourd'hui, un label ESG dans ce domaine est, de fait, quasi impossible (aux côtés de l’alcool, du tabac et des jeux d’argent ...).

Même la France qui a pourtant fait partie des bons élèves en termes d'investissement dans le domaine de la défense n'a pas toujours fait preuve d'une réelle constance (en particulier sous Hollande).

Au lendemain d'un inéluctable traité de paix signé entre l'Ukraine et la Russie dans l'année à venir, ou après un hypothétique effondrement du régime russe dont ils rêvent tous, l'hystérie collective de nos dirigeants européens sera-t-elle encore d'actualité ?

3. Acheter des chars est un investissement qui trouvera toujours des détracteurs acharnés dans notre société. Bien malin est celui capable aujourd'hui de nous dire qui sera au pouvoir en France en 2030 à l'échéance de ce fond d'investissement.  

4. Comment la France compte tenu de son endettement pourra-t-elle financer ces investissements ? Compte tenu de notre niveau d'endettement, il faudra soit augmenter la fiscalité (mais nous sommes déjà champion du monde ce qui plombe nos entreprises), soit trouver des arbitrages au détriment d'autres dépenses ... Mais quels sont les arbitrages que les français accepteront : la justice ? l'éducation ? La santé ? Je ne vous parle même pas des retraites ! Certains sondages montrent qu'une majorité de Français (et j'en fais partie) est favorable aujourd'hui à cette politique de réarmement ... Mais dès que le même sondage pose des questions sur les moyens de financer cette politique, d'ores et déjà, cette majorité s'effondre. Qu'en sera t'il dans deux ou trois ans ?

La France fait déjà aujourd'hui face à un mur de la dette absolument vertigineux ( la question n'est pas son existence mais la distance à laquelle il se trouve et le temps qu'il nous reste avant qu'on se le prenne en pleine figure) et une incapacité depuis 50 ans à apporter la moindre réforme à son modèle social. Comment peut on considérer sérieusement les annonces d'augmentation du budget français de la défense de plusieurs dizaines de milliards d'euros ?

Bref, ce type de financement peut éventuellement être une poule aux œufs d'or. Il présente aussi des risques intrinsèques majeurs ! Et il faudra regarder en détail l'offre qui sera faite et analyser de manière très prudente les engagements sur les commandes à venir. Mais il est fort à craindre que dans la précipitation, nous soyons en train de mettre la charrue avant les bœufs pour participer au développement de nos entreprises !

par LR31 1 avril 2025
par Lignes Droites 13 mars 2025
Lignes Droites soutiendra toutes les candidatures d’union des droites. Bonne chance à David Gerson et à sa future équipe !

par Emmanuel Chaunu 13 mars 2025
par Maxime Duclos, adhérent Lignes Droites 10 mars 2025
Billet d'humeur d'un de nos adhérents,Maxime Duclos :  


En 1997, l’année de ma naissance, le taux de fécondité était de 1,71 enfant par femme, un chiffre déjà bien inférieur au seuil de remplacement des générations, estimé à environ 2,1 enfants par femme, sans que cela signifie pour autant que la parentalité allait de soi. Mais en 2024, les chiffres sont sans appel : 1,62 enfant par femme, et une chute des naissances qui semble inarrêtable. Comment en est on arrivé là ? Et surtout, pourquoi les jeunes d’aujourd’hui ne veulent-ils plus fonder de famille ?

La natalité française a connu une première chute importante après 1972, Mai 68 a profondément transformé la société française, et même si la chute de la natalité après 1972 n’est pas directement causée par ces événements, ils ont joué un rôle dans l’évolution des mentalités et des comportements qui ont ensuite influencé la fécondité. L’entrée massive des femmes sur le marché du travail, l’accès à la contraception et la légalisation de l’IVG en 1975 ont profondément modifié les comportements familiaux. Cependant, après cette période de déclin, la fécondité s’est stabilisée autour de 1,8-2 enfants par femme pendant plusieurs décennies. Depuis 2010, en revanche, la chute est spectaculaire : entre 2010 et 2024, le nombre de naissances est passé de 832 800 à 663 000, soit une baisse de 21,50 %. Un effondrement historique qui ne cesse de s’accélérer, sans qu’aucun véritable sursaut ne semble pointer à l’horizon.

Les raisons sont multiples, mais elles pointent toutes vers une réalité inquiétante : avoir un enfant en 2024 est devenu un choix difficile, parfois même un luxe. Pourtant, il est essentiel d’être honnête avec nous-mêmes : la précarité économique, bien que réelle, n’explique pas tout. Trop de jeunes se cachent derrière cet argument pour justifier un refus d’engagement bien plus profond. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui préfèrent "profiter" avant d’avoir des enfants, cherchant un confort personnel au détriment de la responsabilité collective. Cette mentalité est en partie héritée d’une éducation plus permissive, où les limites ont été repoussées, où la contrainte est devenue un gros mot. Les méthodes pédagogiques modernes, comme Montessori, sont souvent citées comme un progrès, mais elles traduisent aussi un changement de paradigme issu des transformations post-68 : un enfant doit s’épanouir à son rythme, être libre de ses choix, et ne pas être contraint. Résultat ? Une génération qui repousse l’effort, qui cherche avant tout son propre bien-être, et qui voit la parentalité comme une privation de liberté plutôt que comme un accomplissement.

Au-delà de cette évolution sociétale, l’idée même de nation s’efface. Faire des enfants, c’est assurer le renouvellement des générations, maintenir une dynamique économique, préserver un équilibre social. Or, nous vivons dans une société où l’individualisme prime sur l’intérêt collectif. Nous consommons, nous voyageons, nous vivons pour nous-mêmes sans nous soucier des répercussions à long terme. Cette quête incessante de liberté, ce refus des obligations, nous mènent à une impasse. Car moins de naissances, c’est aussi moins de travailleurs demain, une économie qui s’essouffle, et des systèmes de retraite qui s’effondrent. Nous ne voulons plus d’enfants, mais qui paiera alors pour notre vieillesse ?

Peut-on encore inverser la tendance ? Il ne s’agit pas de forcer les jeunes à avoir des enfants, mais de redonner du sens à la parentalité. Il faut retrouver un intérêt commun, réapprendre à voir l’avenir autrement que par le prisme de la jouissance immédiate. Faire des enfants, ce n’est pas seulement une contrainte, c’est une transmission, une continuité, un acte fondateur pour une société. Il faut redonner envie, réhabiliter la famille comme un pilier essentiel du bien-être personnel et collectif, et non plus comme une entrave. Tant que nous resterons enfermés dans cette quête illusoire de liberté absolue, tant que nous refuserons de voir au-delà de notre propre existence, la chute des naissances n’aura aucune raison de s’arrêter. Et avec elle, c’est tout un modèle de société qui s’effondrera.

Sources :

INSEE “Bilan démographique annuel”

INED “Pratiques parentales et enfance"

par Pierre Lellouche 10 mars 2025

"Sans être entendu, je n’ai cessé de répéter depuis avant même qu’elle n’éclate que la guerre d’Ukraine aurait pu être évitée. Qu’elle aurait pu, même, être stoppée dès avril 2022. Qu’au lieu de préparer la « grande offensive » ratée de juin 2023, l’Ukraine et ses alliés auraient dû négocier, avant de se trouver dans une situation bien pire à l’arrivée, comme l’avait prévu, lui aussi, le chef d’état-major des armées américaines, le général Mark Milley, fin 2022."
Une tribune très instructivesur le conflit ukrainiende Pierre Lellouche,spécialiste reconnu en géopolitique:


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